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étaient tellement adorées, que la France, Robespierre en tête, s’en était fait décidément des dieux officiels ; elle avait décrété le culte de la Raison, de la Liberté, etc.

À la fin cependant le mal avait engendré lui-même son remède. À force de réduire la poésie à l’art de déguiser des axiomes génériques et des types impersonnels sous une diction générique et incorporelle, le factice était arrivé jusqu’à devenir intolérable. La nature avait fini par s’apercevoir qu’elle était fort gênée sous toutes les règles décrétées par le bon goût général, et qu’elle aurait plus de bénéfice à faire à sa guise en se passant de l’approbation du suffrage universel. De tous côtés, on se mettait en révolte. Après les mœurs conventionnelles que l’on avait long-temps subies, il commençait à devenir de mode de célébrer les sabots et les bergeries, de déblatérer contre la civilisation et les fauteuils. Ce n’était encore là qu’une nouvelle mode ; mais elle indiquait une grande transformation Par dégoût sans doute pour les grandes maximes sur l’homme en général et sur la manière dont on se fait aimer des femmes en général, Walpole et Percy en étaient venus à remettre en honneur le moyen-âge et la poésie populaire. Comme Marchangy chez nous, on faisait de l’opposition en admirant le gothique et le chevaleresque. Le goût et l’étude des antiquités du nord gagnait peu à peu. Dans la chaire de littérature qu’il occupait à Oxford, Thomas Warton, l’auteur de l’Histoire de la poésie anglaise, ramenait ses élèves aux auteurs du XVIe siècle. L’un de ses disciples, W. Lisle Bowles, allait bientôt publier (en 1789) les sonnets qui firent une révolution dans l’esprit de Coleridge. D’un autre côté, Burke livrait au