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se bat dans l’escalier et dans les salles. « Reischach est là ? crie-t-on, la victoire est à nous… Malheur aux Toscans ! » Les soldats, furieux, échauffés par l’ardeur du combat, tuent, à coups de baïonnette et de crosse de fusil, les Toscans qui se défendent au milieu des nuages de fumée ; le reste jette ses armes et demande quartier. Nous étions maîtres de cette maison ; le général Clam fait aussitôt tirer sur la redoute que nous prenons ainsi par derrière. L’ennemi, se voyant tourné et à découvert sous notre feu, se sauve alors en désordre et nous abandonne la redoute ; nos troupes entrent en même temps de tous les côtés à la fois dans le village, et des pelotons débouchent de toutes parts en se criant les uns aux autres, de peur d’erreur : Vive Prohaska ! ne tirez pas !

Pendant que nous prenions la redoute de Montanara, le colonel Benedek s’était emparé de Curtatone. Après avoir tenté l’assaut plusieurs fois et avoir vu ses gens renversés par la mitraille, il avait franchi le premier le parapet à la tête du régiment de Paumgartten et emporte la redoute ; laissant alors une partie de sa brigade achever la déroute ; de l’ennemi, il avait marché tout de suite sur Montanara ; où le combat durait encore, et fait prisonnier tout ce qui essayait de se sauver par la route qui mène à Curtatone.

Le général prince Liechtenstein, de son côté, n’ayant pas trouve l’ennemi à Buscaldo, s’était porté, derrière Montanara, sur les bataillons de réserve des Toscans ; il marcha à l’assaut des maisons où ils venaient de se retirer à son approche. Ces Toscans se défendirent avec un courage héroïque, car ils espéraient donner ainsi au reste de leurs troupes, qui fuyaient en désordre de Montanara, le temps de se retirer ; mais ces maisons furent bientôt cernées, prises d’assaut, et les Toscane mirent bas les armes. Ce qui échappa de ces troupes se sauva dans toutes les directions, ceux de Curtatone vers Goïto, et ceux de Montanara, coupés de cette ligne de retraite par le colonel Bencdek, vers Marcaria et l’Oglio.

Le combat, était fini ; les capitaines reformaient les compagnies ; les cris de vive Clam ! vive Reischach ! s’élevaient de toutes parts ; on s’embrassait, on se serrait les mains ; les noms des plus braves volaient déjà de bouche en bouche ; la joie, l’enthousiasme du triomphe étaient dans tous les yeux ; pourtant je vis des larmes couler à la vue de tant de camarades qui avaient marché au combat si braves, si pleins de courage et d’ardeur, et qui maintenant étaient couchés dans l’herbe, défigurés par les balles. Pour moi j’étais brisé de fatigue et ne pouvais plus parler ni me tenir debout, tant j’avais couru et crié pour animer les soldats au combat ; mais la joie une donnait des forces : on m’amena mon cheval, et le général Clam me dit d’aller annoncer au maréchal le succès de l’attaque, en ajoutant qu’il demanderait la croix