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à toutes les grandes chutes, quelques débris monastiques enfin que leur dispersion rendait inoffensifs et qui ne demandaient pas mieux d’ailleurs, à l’exemple des frayles espagnols, que de se faire oublier ; voilà à quoi se réduisait la faction de l’infant ; mais, à cette époque, la querelle avec le saint-siège était arrivée aux dernières limites de l’aigreur, et les manifestes anti-religieux que le groupe radical opposait aux manifestes peu constitutionnels de M. l’évêque de Vizeu n’étaient pas de nature à l’amortir. Devant cette malencontreuse intervention des radicaux, la fraction conciliante du clergé et les populations rurales à sa suite sortaient déjà de leur neutralité. On comprend quel parti la propagande miguéliste aurait tiré tôt ou tard d’une pareille situation. Les paysans, cette propagande aidant, pouvaient aisément confondre à distance la politique du gouvernement septembriste de la reine avec celle de clubs qui se disaient également septembristes ; le miguélisme expirant menaçait de se retremper dans l’énergie persistante du sentiment religieux, et la liberté même d’association, source première des provocations exploitées par ce parti, lui offrait des moyens d’action très redoutables. En même temps que la politique septembriste ravivait autour du système constitutionnel tous les vieux périls, elle lui aliénait un point d’appui précieux : je veut parler de l’influence aristocratique.

La vieille noblesse portugaise, prise dans son ensemble, ne penche pas vers le miguélisme, comme on l’a cru souvent chez nous. Son esprit de corps, bien loin de se résumer comme ailleurs en un dévouement passif au principe monarchique, tendrait plutôt à certaine affectation d’indépendance qui rappelle en petit l’allure de nos anciens grands vassaux, — voire à certaines velléités d’égalité. Plus d’un fidalgo laisse volontiers soupçonner qu’il est d’un peu meilleure maison que les Bragance. Dans ces dispositions, et à part même la question de droit qui n’est pas douteuse, la grandesse trouvait donc, réflexion faite, beaucoup plus son compte au pouvoir limité d’une royauté constitutionnelle qu’au pouvoir absolu revendiqué par le prétendant. Comme elle exerce d’ailleurs un ascendant réel sur les autres classes, elle s’accommodait encore assez de leur accession au gouvernement, pourvu qu’on lui laissât, bien entendu, dans le nouvel ordre de choses une place privilégiée. La charte de dom Pedro, qui introduisait dans la chambre haute l’élément héréditaire, répondait à ces secrètes prétentions. Aussi une portion notable de la vieille aristocratie s’y rallia-t-elle dès le début. Le reste boudait encore un peu pour la forme et par bel air, mais grillant au fond d’impatience qu’on la priât d’entrer dans un milieu où les grandes influences se partageaient, lorsque l’avènement des septembristes, qui apportaient dans leur bagage le principe d’une pairie élective et même celui d’une chambre élective unique, vint refouler