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Aussi quels hommages rendus à sa mémoire ! Quelles belles et glorieuses séances que celles que le parlement interrompt en signe de deuil, et celles où les amis de Robert Peel refusent en pleurant les funérailles publiques que la patrie leur offre, parce qu’ils ne peuvent pas les préférer aux funérailles de famille qu’a voulues l’illustre défunt ! car, sachons-le bien, là où la patrie est si bien constituée, la famille cependant domine et prévaut sur la patrie dans le cœur des hommes, et la patrie ne s’en plaint pas ; elle s’applaudit au contraire que ses plus véritables et ses plus solides fondemens soient entourés de tant de respect et de si pieuses préférences.

Nous ne jugerons pas ici la politique extérieure et intérieure de sir Robert Peel pendant sa longue carrière publique. Nous ne voulons faire que deux courtes remarques à ce sujet. L’histoire dira qu’il y a eu, dans notre siècle et depuis trente ans, une école d’hommes d’état qui se sont, dans les divers pays de l’Europe, glorieusement employés à maintenir la paix du monde : en France, le roi Louis-Philippe, et avec lui MM. Molé, de Broglie, Thiers et Guizot ; en Autriche, M. de Metternich ; en Russie, M. de Nesselrode ; en Prusse, le vieux roi de Prusse et ses ministres ; en Angleterre, lord Wellington, lord Aberdeen, lord Lansdowne, lord John Russell, et parmi eux, au premier rang, sir Robert Peel. Ce sera l’honneur de ces hommes d’état d’avoir su, en soutenant les légitimes intérêts de leur pays, subordonner ces intérêts au maintien de la paix générale, et d’avoir toujours préféré la grande politique à la petite. Nous sommes moins à notre aise, nous l’avouions, pour louer la politique intérieure de sir Robert Peel, et particulièrement la politique commerciale qu’il avait adoptée depuis quelques années. Il y a là une grande expérience qui se fait sans qu’on puisse encore en juger les résultats. Le libre échange fera-t-il la prospérité de l’Angleterre, ou bien l’agriculture et par conséquent la propriété anglaise recevra-t-elle du coup un échec dont elle aura de la peine à se relever ? C’est là une grande question. L’avenir seul sait ce qu’il gardait à M. Peel et ce que la mort lui a enlevé.

La paix entre l’Allemagne et le Danemark, la dissolution de la chambre des députés en Wurtemberg, enfin les projets d’union commerciale présentés par l’Autriche, tels sont les trois points qui doivent attirer l’attention du public ; mais nous renvoyons à la prochaine chronique ce que nous voulons dire à ce sujet. En Allemagne, nous ne sommes jamais pressés de nous mettre au courant. Les projets y vont si vite, et les événemens y vont si lentement, que d’une part on est toujours à temps pour dire ce qui doit durer, et que d’autre part il est fort inutile de rappeler ce qui a vécu à peine.


Depuis plusieurs mois, l’Espagne semblait n’avoir qu’une pensée ; d’un bout à l’autre de la Péninsule, ce singulier peuple espagnol attendait avec une impatience fébrile la naissance d’un héritier royal. Quel serait le cérémonial adopté pour le baptême de l’infant ? Telle était la grande préoccupation de Madrid. Les brochures abondaient sur ce sujet, et nous en avons une entre les mains que nous recommandons aux chercheurs de curiosités historiques. Les pompes de la vieille monarchie y sont décrites avec la minutieuse exactitude