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pas dit de voter pour faire un monarque, il a dit de voter par convenance et par dignité. Pourquoi aller plus loin ? pourquoi aller à côté ? pourquoi aller au-dessus ?

Nous avons dit qu’aucune des conséquences du vote des frais de représentation ne nous effrayait ; il est une conséquence pourtant qui nous effraierait : si de ce vote devait naître la scission de la majorité, oh ! alors nous serions inquiets ; mais pourquoi une grande portion de la majorité voudrait-elle dorénavant et à cause de ce vote faire bande à part ? Pourquoi voudrait-elle à toute force faire de ce vote une politique nouvelle, une ère particulière ? La réforme électorale a été le commencement de quelque chose, nous l’espérons ; mais le vote des frais de représentation ne peut être le commencement de quelque chose que si on l’y oblige à force de l’en accuser. — Vous êtes un optimiste, nous dit-on, ou vous êtes un endormeur. Voyez en effet deux symptômes significatifs : d’une part, on commence à parler de la prolongation de la présidence ; de l’autre, une partie de la majorité refuse de mettre à l’ordre du jour la loi sur les maires. Un mot sur chacun de ces deux symptômes.

On parle de la prolongation de la présidence : est-ce seulement depuis le vote des frais de représentation ? est-ce à cause de ce vote ? Est-ce que par hasard personne avant ce vote ne sentait les dangers et les inconvéniens d’un pouvoir à courte échéance ? Est-ce qu’on ne disait pas que la vue de cette courte échéance empêchait l’essor des affaires ? Ne mettez donc pas au compte du vote des frais de représentation les entretiens qui peuvent avoir lieu sur la prolongation de la présidence. Avec ou sans frais de représentation, la présidence triennale a toujours paru trop courte. Nous en disons autant de l’assemblée triennale, surtout quand l’assemblée est unique. Non, la question de la révision de la constitution n’est pas une question qui date de quinze jours, et c’est une mauvaise plaisanterie que de la faire procéder du vote des frais de représentation, à moins qu’on ne soit décidé à faire procéder toutes choses de là, et à changer, bon gré mal gré, un chiffre en principe.

Voilà pour le premier symptôme ; voici pour le second. La répugnance que la loi des maires inspire au parti légitimiste ne date-t-elle non plus que du vote des frais de représentation ? Il y a long-temps déjà que la loi des maires a été présentée et qu’elle a été mal accueillie par le parti légitimiste. Il y a long-temps même que le rapport qui conclut au rejet de la loi a été déposé sur le bureau de la chambre. Ce que les légitimistes ont fait, il y a trois jours, en rayant la loi des maires de l’ordre du jour, ils l’auraient fait avant le vote des frais de représentation.

Nous avons beau faire, nous ne voyons pas de conjuration pour ou contre le président, qui soit née ou près de naître du vote des frais de représentation. Nous ne concevons donc pas les alarmes qu’on veut faire naître sur l’union de la majorité. Nous cherchons même dans notre mémoire de quinze jours s’il y a eu pendant la discussion de cette loi, soit dans l’assemblée, soit dans la presse quotidienne, quelque chose qui ait pu blesser les affections et les souvenirs de la majorité. Nous ne trouvons, au contraire, que des choses qui ont dû plaire à la majorité ; nous ne trouvons que des retours de justice et d’équité vers le régime d’avant 1848. Ainsi Dieu sait quelles sottes et misérables calomnies avaient été répandues sur la liste civile et sur la fortune du roi Louis-Philippe ;