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VOYAGE ARCHÉOLOGIQUE EN PERSE.


de souvenirs de gloire, se rangent plusieurs groupes d’antiquités d’âges et d’espèces différens. Ils sont situés dans une immense plaine dont l’étendue est de soixante-dix à quatre-vingts kilomètres, avec une largeur moyenne de dix kilomètres. Cette plaine porte aujourd’hui le nom de Merdâcht. Elle est traversée dans toute sa longueur par une rivière qui est généralement considérée comme l’Araxe des anciens, et qui s’appelle actuellement Bend-Amir. Au nord-est, s’ouvre une vallée qu’arrose un autre cours d’eau dont le nom varie, comme presque tous ceux de la Perse, suivant la localité qu’il parcourt. Ainsi, là il s’appelle Sivend-Roûd, ou rivière de Sivend ; à quarante kilomètres de ce lieu, on le nomme Morgh-Ab. À l’entrée de cette vallée sont situées les ruines d’Istâkhr, les rochers sculptés de Nâkch-i-Roustâm ; dans la plaine de Merdâcht sont les antiquités connues sous le nom de Monts-Istâkhr, Tâkht-i-Roustâm, Nâkch-i-Redjâb, et Tâkht-i-Djemchid, ou Persépolis proprement dit.

Parmi ces monumens, les plus anciens doivent avoir le pas dans l’attention de l’archéologue sur ceux d’une époque plus récente ; la première place appartient donc à l’ensemble de ruines comprises sous le nom commun de Persépolis et remontant à l’époque des Achéménides : ces monumens révèlent à la première vue trois destinations bien différentes. Sur les bords du Sivend-Roûd devait être la ville dont le nom perpétué jusqu’à nos jours était Istâkhr. — Au nord-est de la plaine de Merdâcht, et adossés au pied des montagnes qui la ferment de ce côté, s’élevaient les palais, résidence habituelle des souverains, auxquels les Persans modernes ont donné le nom de Tâkht-i-Djemchid. — Enfin, au débouché de la vallée du Sivend-Roûd, dans la plaine de Merdâcht, étaient les caveaux de sépulture, la nécropole des rois, appelée encore aujourd’hui par les habitans Kabrestaân-Kauroûn, ou cimetière des Guèbres. Les autres antiquités qu’on remarque autour des ruines d’Istâkhr, de Takht-i-Djemchid et de la nécropole des rois, ne sont que des annexes de ces trois groupes principaux, ou bien ce sont des monumens d’un âge postérieur, entés en quelque sorte sur les anciens : de ce genre sont ceux de Nâkch-i-Roustâm et de Nâkch-i Redjâb, dont les sculptures sont d’époque sassanide.

Le nom d’Istâkhr est d’origine zend, et le site ainsi nommé atteste d’une manière non équivoque l’emplacement d’une ville. La dénomination d’Istâkhr se retrouve dans plusieurs écrivains orientaux ; mais on la cherche en vain dans les auteurs anciens : on est fort embarrassé pour décider si ce nom doit indiquer la ville capitale au temps des Achéménides, et à laquelle les Grecs auraient donné le nom de Persépolis, ou s’il ne désigne que celle qui, sortie des cendres de la cité de Darius, subsista jusqu’à l’invasion des Arabes. L’embarras s’augmente par le rapprochement des assertions très divergentes des historiens : les