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reçoive l’équivalent à la minute même, soit en écus, soit en lingots ; soit en effets de commerce bien garantis et à court terme ; pareillement, jamais un écu n’est sorti de ses guichets sans qu’une juste contre-valeur ne soit entrée au préalable dans son portefeuille : d’où il suit que l’élévation de la circulation importe peu à la Banque. » Tout le monde sait que les banques de circulation étant en même temps des établissemens de prêt et d’escompte, les billets ne sortent de leurs caisses que pour s’échanger contre des valeurs égales ; contre des espèces, contre des titres de rente ou contre des effets commerciaux ; mais les billets de banque sont des promesses de paiement dont le porteur peut exiger la réalisation à toute heure, tandis que les effets de commerce ne sont payables qu’à terme, et que les rentes données en garantie d’une dette ne doivent être réalisées qu’à l’échéance de cette dette et à défaut du paiement. Pour parer aux demandes de remboursement que peuvent faire les porteurs de leurs billets, les banques gardent généralement en caisse une certaine réserve d’écus. À quelle proportion doit s’élever cette réserve, pour faire face aux éventualités qu’embrasse la prévoyance humaine ? Sur ce point, la théorie se donne carrière, et l’expérience n’a pas encore prononcé. Les uns veulent que l’encaisse métallique représente le tiers de la circulation, les autres exigent la moitié ; mais la nécessité d’une forte réserve en écus n’est mise en doute par personne.

Ces écus doivent-ils appartenir à la Banque en totalité ou en partie ? Le défenseur de la Banque de France ne le pense pas. Il ne veut composer la réserve en numéraire que des espèces échangées contre des billets ou déposées par le public en compte courant. Toute réserve permanente, dit-il, provenant d’une autre origine, serait en quelque sorte un double emploi, une superfétation incommode, peut-être même un accroissement de danger en cas de révolte à main armée et de troubles civils. » On me permettra de ne pas m’occuper du danger de pillage ; c’est l’affaire de la gendarmerie. Si l’autorité publique devait rester impuissante en pareil cas, le désordre s’attaquerait aux caisses privées aussi bien qu’aux institutions placées sous la sauvegarde de l’état ; on pillerait partout où il y aurait quelque chose à prendre. Mais que veut dire la Banque, quand elle prétend qu’une réserve métallique empruntée au capital ferait double emploi avec les espèces qui proviennent des capitaux déposés en compte courant ? Est-ce que les déposans ont entendu que leur argent servirait de garantie à la circulation ou de ressource à la Banque ? N’ont-ils pas versé au contraire ces sommes dans la caisse de l’établissement comme dans la leur propre, avec la pensée de les reprendre quand il leur plairait, le lendemain peut-être ? La Banque doit les dépôts en compte courant, comme elle doit la valeur de ses billets. Ces deux natures de passifs sont également