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autre esprit que du désir sincère de résoudre pour le mieux les questions agitées ?

Les premières de ces questions étaient relatives à ces grands problèmes sociaux qui se débattent de nos jours avec de si terribles vicissitudes. « A tout seigneur tout honneur, » dit le proverbe, et le seigneur, c’est aujourd’hui le peuple. Les intérêts spéciaux de l’agriculture, des manufactures et du commerce viendront après ; avant tout, il faut s’occuper de la condition des classes ouvrières et de l’organisation générale du travail. Nous ne blâmons pas cette préférence, bien au contraire. À nos yeux, l’amélioration du sort du plus grand nombre, le rapprochement aussi complet que possible des conditions humaines, étaient, bien avant la révolution de février, la grande tâche de notre temps. Le dernier gouvernement y travaillait avec une ardeur et un succès que l’on commence enfin à reconnaître. Par l’institution des caisses d’épargne, des salles d’asile, des crèches, par la multiplication indéfinie des établissemens de charité publique et privée, par la diffusion de l’instruction primaire et surtout par la masse des salaires que répandaient parmi les ouvriers ses immenses travaux publics, ce gouvernement a plus fait en dix-huit ans pour le peuple que bien des siècles précédens. La révolution de février a arrêté ce progrès et ramené violemment en arrière toutes les classes de la société ; les classes ouvrières en souffrent encore plus que les autres, car elles avaient moins les moyens de perdre. Le moment est venu de reprendre le travail interrompu, et nous comprenons très bien que le premier soin comme le premier devoir du conseil général ait été de s’occuper des intérêts populaires.

Dès que le conseil s’est réuni en assemblée générale pour s’occuper de l’expédition des affaires, business, comme disent énergiquement les Anglais, la question qui est venue la première a été celle des caisses de retraite. Voici dans quelle situation elle se présentait : dans le discours du trône qui a ouvert la session si fatalement terminée le 24 février, le gouvernement royal avait annoncé la présentation prochaine d’un projet de loi sur la formation de caisses de retraite pour les ouvriers ; depuis, les événemens ont balayé tous les projets préparés à cet effet, et, après une révolution faite au nom du peuple, le peuple attend encore une institution dont il aurait pu jouir depuis deux ans. Dès que l’ordre a été un peu rétabli dans les pouvoirs publics, la question a été reprise ; en 1848, sous la constituante, le comité du travail a formulé un projet, mais qui n’a pu aboutir ; enfin, après beaucoup de fluctuations, le gouvernement et la commission de l’assemblée actuelle ont fini par se mettre d’accord sur une rédaction : c’est ce dernier projet qui a déjà subi l’épreuve de plusieurs discussions, mais qui n’a pas encore passé par le vote définitif, que le conseil général