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l’économie et de l’équilibre financier, il faut ajouter la charge des travaux extraordinaires. Le gouvernement demande 54 millions, sur lesquels 29 millions seulement doivent être consacrés aux chemins de fer. Or, comme il restait, à partir de 1850, 234 millions de dépenses pour l’achèvement des lignes commencées, sans y comprendre celle de Paris à Avignon, huit années dans cette proportion seraient encore nécessaires : on n’irait pas, avant huit ans, de Paris à Metz et à Strasbourg, ni de Paris à Bordeaux et à Nantes. Nous verrions ainsi nos communications interrompues avec les frontières les plus exposées et avec nos villes les plus importantes, lorsque les chemins de fer de l’Allemagne peuvent nous amener en quarante-huit heures une armée russe sur le Rhin. Il faudra donc porter à 35 millions, au minimum, pour les exécuter en six années, l’allocation annuelle des chemins de fer, et par conséquent à 60 millions les travaux extraordinaires. Cela donne un total de 1,340 millions pour les dépenses de toute nature en 1851

Les recettes sont évaluées à 1,292 millions : retranchons-en 12 millions, pour éviter l’exagération et pour n’embrasser que des résultats probables ; nous retombons à un chiffre de 1280 millions, chiffre égal à celui des dépenses ordinaires. Ce n’est pas là l’équilibre que nous cherchons. Il est temps de supprimer enfin cette distinction entre l’ordinaire et l’extraordinaire. Les travaux à exécuter sont la conséquence d’engagemens pris ; des dépenses également obligatoires ne peuvent pas s’effectuer à des titres différens. Les charges réelles, les charges complexes de 1851 s’élèveront à 1,340 millions ; il faut donc trouver encore 60 millions par un procédé ou par un autre.

M. le ministre des finances propose d’y pourvoir par une vente, de domaines pour 6 millions, de francs, et jusqu’à concurrence de 50 autres millions par une vente de forêts. J’accepte le produit de ces domaines sans rapport comme une ressource accidentelle ; mais je repousse, comme un gaspillage improductif, l’aliénation des bois de l’état. Il n’échappera d’ailleurs à personne que prétendre retirer à la fois 36 millions des coupes et 50 millions de la vente d’une partie considérable du sol forestier, c’est se poser un problème aujourd’hui et pour long-temps insoluble. À défaut de cet expédient, on ne peut pas laisser, en 1851, 54 millions de plus à la charge de la dette flottante, qui serait reportée ainsi à 580 millions ; car nous retomberions alors dans les embarras mêlés de périls dont le trésor est aujourd’hui assiégé, et dont il doit sortir à tout prix.

Il n’y a que deux solutions possibles, l’emprunt ou l’impôt. Je me rallierais à l’emprunt comme à un pis aller, et dans le cas seulement où il resterait démontré que l’impôt n’offre plus de ressources, car ce ne serait pas vider la difficulté : l’emprunt n’est qu’un expédient de