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aborder les travaux de long cours. On ne produit plus chaque jour que ce que demande la consommation quotidienne. Les régions du crédit semblent se fermer devant l’industrie et le commerce. La Banque de France, qui est le plus grand escompteur du papier de commerce, n’avait, le 11 avril dernier, que pour 105 millions d’effets dans son portefeuille ; le 15 mars 1848, au plus fort de la tourmente révolutionnaire, les valeurs de ce portefeuille s’élevaient encore à 303 millions. Ainsi, le mouvement des affaires va se ralentissant d’heure en heure ; il y a là comme un immense rouage à remonter.

Dans les crises politiques, qui dominent et qui déjouent les efforts des individus, l’état devient en quelque sorte l’assureur général des fortunes. Son intervention, imprudente et mauvaise en temps régulier, est alors légitime et salutaire : c’est à lui de réparer le mal qu’il a fait ou que l’on a fait en son nom. Le gouvernement, pour soulager le budget des travaux extraordinaires, autant que pour ranimer l’esprit d’association et pour rappeler les capitaux vers l’industrie, avait proposé à l’assemblée législative de concéder, moyennant la garantie d’un intérêt de 5 pour 100, sur un capital de 260 millions, le chemin de fer de Paris à Avignon à une compagnie unique. Cette combinaison vient d’échouer devant la coalition des intérêts locaux ; ce qui prouve que la république est travaillée de la même corruption qui a énervé et qui a perdu la monarchie. Il en sortira, pour premier résultat, un accroissement de 30 à 40 millions dans les dépenses de l’état pendant l’exercice 1850.

La commission du budget ne paraît pas avoir cherché à se placer à la hauteur de cette situation difficile. M. Gouin, rapporteur du budget des recettes, déclare lui-même qu’il ne faut considérer son travail que comme un premier pas vers un état meilleur. » Encore l’honorable rapporteur s’exagère-t-il la portée du projet amendé ; il n’y a rien de fait, et l’on ne marche pas vers un état meilleur, tant qu’on reste dans le provisoire. Sous ce rapport, la commission a suivi l’exemple du ministre, dans les mains duquel, j’en conviens, l’initiative des plans financiers est mieux placée.

La commission du budget évalue les recettes ordinaires de 1850 à 1251 millions ; elle y ajoute 32 millions pour le produit des trois nouveaux impôts sur le timbre, sur l’enregistrement et sur la poste, plus 84 millions de ressources extraordinaires, composées principalement de la dotation de l’amortissement que l’on enlève à son action normale ; ce qui porte les recettes de toute valeur à 1,368,419,117.fr., somme supérieure de 775,429 fr. au chiffre global des dépenses. La dépense des travaux extraordinaires, réduite de 103 millions à 58, reste en dehors de l’affectation de ces ressources : la dette flottante doit y pourvoir.

Voici maintenant le résultat probable que donnera la liquidation de