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une caisse générale à organiser par l’état pour la France entière ; c’est répondre à un besoin réel. Il ne faut pourtant pas que la caisse générale exclue la fondation de caisses locales qui s’appliqueraient à un certain nombre de fabriques similaires réunies dans une même ville ou dans un certain rayon, qui même se restreindraient à quelque établissement unique d’une importance exceptionnelle. À l’époque où le conseil général s’est réuni, le Moniteur a publié les statuts que, sur la proposition de l’administration, venait d’approuver le conseil d’état, d’une caisse de retraite spéciale fondée à Lyon pour l’industrie des soieries, sous les auspices de la chambre de commerce, et liée à une société de secours mutuels dont le plan est remarquable. Depuis quelques années, dans quelques-unes de nos grandes fabriques des caisses particulières pour les retraites avaient été créées avec le concours des patrons[1]. Donner aux caisses de retraite le caractère local ou municipal, c’est rendre plus d’un service à la chose publique : d’abord, c’est exciter l’esprit municipal, seul contrepoids possible aux inconvéniens d’une centralisation excessive, contre laquelle l’opinion réagit en ce moment. En second lieu, c’est consolider les caisses de retraite, c’est leur faire jeter dans les mœurs des racines profondes. Enfin c’est leur ménager des ressources plus abondantes. Le conseil municipal et la chambre de commerce de Lyon peuvent accorder un subside à une institution lyonnaise ; un particulier de Lyon peut la doter d’une somme ou lui laisser un legs. La ville, la chambre de commerce et le particulier ne donneront rien à une institution générale étendue sur toute la France ; le bien qu’ils voudraient faire à leurs concitoyens immédiats n’irait pas à son adresse. Dans les caisses de retraite qui seraient affectées à un établissement seul ou à un groupe peu nombreux d’établissemens similaires, la retenue obligatoire, qu’on a écartée avec raison de la loi sur la caisse générale, devient praticable comme conséquence d’une convention librement acceptée par l’ouvrier à son entrée, et cet article du contrat aurait presque toujours pour pendant une subvention du chef d’industrie à la caisse. De cette manière, le nombre des ouvriers affiliés à des caisses de retraite serait plus grand, et les caisses feraient plus de recettes. La seule difficulté que soulèvent les caisses locales, à l’usage d’une seule fabrique ou d’un petit groupe, est relative au bon aménagement des fonds ; mais ce n’est pas insurmontable. Supposons que l’administration eût ouvert au sein du conseil général un débat sur la question de savoir ce que la loi et l’autorité agissant officieusement pourraient faire pour

  1. L’industrie du Haut-Rhin, qu’on trouve à la tête des innovations fécondes, en offrait divers exemples. La dernière fondation de ce genre avait eu lieu près de Mulhouse, à Rixheim, chez MM. Zuber. En ce moment, on achève d’organiser à Mulhouse même une grande caisse de retraite qui a quelque analogie avec celle de Lyon.