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jamais personne, et que tous ceux qui y croyaient passaient de la réprobation à la vie, mais que ceux qui la haïssaient et n’y croyaient pas étaient condamnés par elle, quoiqu’ils fissent profession de Christ. »

Et lui, Fox, il était appelé à détacher les hommes de leurs images, leurs signes de croix, leurs aspersions d’enfans, leurs saints jours et toutes leurs traditions judaïques. Il était envoyé pour les enlever à leurs misérables livres, aux inventions et aux opinions humaines, aux écoles où se fabriquent des ministres du Christ, qui ne sont que des docteurs de leur propre façon. Par la puissance divine, il devait leur faire abjurer toutes les religions du monde pour les ramener au Christ intérieur, à l’esprit même qui a dicté les Écritures, afin qu’ils pussent ainsi avoir la vraie religion, visiter l’orphelin, la veuve et l’étranger, et se tenir purs eux-mêmes de la contagion. Bien plus, il lui avait été enjoint d’arracher les hommes à la vanité, au mensonge, à la violence et à ses causes, au glaive du magistrat comme à tout ce qui le rend nécessaire, et, alors qu’il avait reçu mission de porter témoignage contre toutes ces choses, le Seigneur lui avait ordonné de dire tu et toi à tout homme et à toute femme riche ou pauvre, « de ne jamais souhaiter le bonjour ou le bonsoir, ni tirer la jambe devant personne, ni ôter son chapeau enfin à qui que ce fût, parce que l’honneur du chapeau était un honneur d’en bas que Dieu traînerait dans la poussière, un honneur que les orgueilleux exigeaient de leurs semblables, sans chercher l’honneur qui vient de Dieu seul. »

Tout le reste de sa vie, — et il vécut jusqu’à soixante-sept ans, — George Fox le consacra scrupuleusement à accomplir ce qu’il regardait comme son devoir. Insensible aux fatigues et sans cesse absorbé dans son idée fixe, il allait de village en village, de ville en ville, confessant intrépidement sa foi partout où il y avait des hommes pour l’écouter. Tour à tour et à diverses reprises, il visita ainsi les divers comtés de l’Angleterre, l’Écosse, l’Irlande, la Hollande et l’Amérique du Nord. Dans les marchés, il venait dénoncer les faux poids, les marchandises de mauvaise qualité, les fraudes et les escroqueries, sommant les marchands d’être honnêtes, d’avoir des oui qui fussent des oui, des non qui fussent des non, et rappelant à tous le terrible jour du Seigneur auquel nul ne pouvait échapper. Entrant dans les tavernes, il prêchait contre l’ivrognerie, les rixes et les blasphèmes, et il exhortait les cabaretiers à ne point servir à leurs visiteurs « plus de boisson qu’il ne leur en fallait pour leur bien. » Il allait avertir les douaniers et les collecteurs d’impôts que Dieu défend d’opprimer le pauvre. Il se présentait dans les écoles, les ateliers, les maisons particulières, pour recommander aux instituteurs et aux chefs de famille de donner eux-mêmes l’exemple des vertus aux enfans confiés à leurs soins et de les élever dans la crainte du Seigneur et la sobriété. Dans le pays de Cornouailles,