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par demander deux choses : d’abord la révision et une répartition plus équitable de toutes les taxes spéciales qui pèsent exclusivement sur l’agriculture et qui s’élèvent à 300 millions par an ; en second lieu, la péréquation des taxes locales. En effet, les taxes locales en Angleterre sont calculées sur des évaluations fort anciennes, car elles datent d’un siècle et même davantage. Or, depuis ce temps, la valeur des terres a beaucoup changé. Dans certaines contrées, les terres ont été considérablement améliorées ; dans d’autres, elles sont demeurées stationnaires ; dans d’autres enfin, leur produit a baissé. Il en résulte que la répartition des taxes locales, qui pouvait être fort équitable à la fin du dernier siècle, a cessé de l’être aujourd’hui, et que certains comtés sont fort grevés, tandis que d’autres supportent des taxes légères. M. Disraëli voulait que partout les taxes locales fussent élevées au niveau de celles des comtés les plus grevés, du Buckinghamshire, par exemple. L’accroissement de recettes ainsi obtenu aurait été consacré à la formation d’une caisse d’amortissement dont l’action amènerait bientôt les fonds publics au-dessus du pair, ce qui permettrait aux agriculteurs de se procurer, au taux de 2 et demi ou de 3 pour 100, les sommes nécessaires à l’amélioration du sol ou au remboursement des créances hypothécaires. Nous n’avons pas besoin de dire que ce plan n’a rencontré aucune faveur ; l’idée de venir indirectement en aide à l’agriculture en lui imposant directement une charge nouvelle au moment où elle succombait sous la concurrence étrangère n’était pas de nature à faire des prosélytes parmi les fermiers. Les critiques abondèrent. M. Disraëli n’a point hésité à modifier son plan, et, sans abandonner l’idée de créer cette caisse spéciale destinée à faire baisser au profit de l’agriculture l’intérêt de l’argent, il parle maintenant de l’alimenter avec le produit de droits fixes, mais modérés, sur les céréales importées de l’étranger, et spécialement sur le blé. D’autres membres du parti protectioniste proposent pour remède l’égalisation des charges publiques : ils demandent qu’on fasse pour l’agriculture ce qu’on a fait depuis dix ans pour l’industrie. On a supprimé tout impôt sur les matières premières : qu’on supprime tout impôt direct sur l’agriculture, sur ses produits et sur les matières qu’elle emploie, les droits sur le houblon, sur la drêche, sur le sel, sur les portes et fenêtres. Si l’on ne veut pas supprimer les impôts directs qui pèsent sur la propriété foncière, qu’on assujétisse à l’impôt, en vertu de l’égalité, les capitaux employés dans l’industrie et les capitaux placés dans les fonds publics.

On sait quel est le système de M. Cobden. Ce qui cause, suivant lui, la détresse de l’agriculture, ce n’est pas l’abolition des corn-laws, c’est le poids excessif des impôts dont elle est chargée, et qui l’empêchent de soutenir la concurrence étrangère. Il faut donc faire disparaître du budget certaines taxes imposées à l’agriculture, et dont le produit s’élève à 250 millions ; mais ce n’est pas à d’autres taxes qu’il faut demander