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une science qui m’apprendrait qu’un secours donné ainsi est mal donné, et qu’il vaut mieux laisser souffrir le pauvre que le soulager contrairement aux règles économiques.

Cet impôt est bien lourd. Bon nombre de familles plient sous le fardeau. Beaucoup qui sont eux-mêmes sur le penchant de la pauvreté ne peuvent secourir que sur leur nécessaire les plus pauvres qu’eux. Pour la classe des fermiers en particulier, sous l’empire d’une réforme qui ouvre les ports de l’Angleterre aux blés étrangers, la taxe des pauvres vient s’ajouter à leurs pertes. Cependant personne ne propose la suppression de l’impôt. On trouve la charge excessive, mais on ne parle pas de s’y dérober ; on diffère d’avis sur le mode de paiement ; sur la dette, on est d’accord.

C’est du reste le débiteur qui répartit lui-même sa dette et qui la distribue par ses propres mains. Des gardiens des pauvres sont élus dans chaque commune pour remplir ce double office et concilier l’intérêt du pauvre avec les ressources de ceux qui l’assistent. Toutes les semaines, ils se réunissent à la maison commune. Quiconque est dans le besoin peut se présenter à leur tribunal de charité ; ils examinent délicatement j’espère, si sa pauvreté vient du travail ou du désordre et, selon l’enquête, ils l’admettent à une part dans les revenus des pauvre, ou ils le refusent. D’autres agens de charité, nommés annuellement par le magistrat, exercent une sorte d’inspection de bienfaisance (overseers) sur les pauvres de la paroisse ; ils préviennent souvent les déclarations, ils reconnaissent et ils font valoir le droit du pauvre honteux. S’il est valide, ils lui cherchent du travail.

La loi des pauvres peut n’être pas de bonne économie, mais elle est du moins de bonne politique. Elle prouve publiquement au pauvre que la société où il vit s’occupe de ses besoins et qu’elle cherche à porter remède aux inévitables maux qui naissent de l’inégalité des conditions ; elle lui montre, dans la classe la plus rapprochée de lui, l’élite des honnêtes gens qui, après avoir payé leur part de ce qui lui est dû, lui donnent encore leur temps pour en faire la répartition équitable, et qui tantôt écoutent sa plainte à leur tribunal, tantôt vont de leur personne la recueillir dans le taudis où se cachent quelquefois des souffrances fières, parce qu’elles ne sont pas méritées. Si elle n’ôte pas l’envie, elle lui ôte du moins ses prétexte.

Les maisons de travail sont une des applications les plus discutées de l’impôt des pauvres. Un inexprimable intérêt m’attirait dans ces établissemens, quoique je ne sois sorti d’aucun sans avoir le cœur serré. La charité y a trop un air de geôle. Je ne pouvais m’accoutumer à ces tableaux affichés au parloir où sont indiquées, par grammes, les rations des malheureux reclus, et qui vous donnent la moyenne de ce que doit manger l’être humain pour ne pas mourir ; à cette chambre