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regardé l’existence d’une armée permanente comme incompatible avec la forme républicaine. Sur ce point, les leçons de l’histoire de notre première révolution sont parlantes. Point d’armée possible sans l’unité du pouvoir et cette vertu du commandement suprême qui empêche les rivalités secondaires et achève la hiérarchie militaire, vertu que les nations guerrières n’ont jamais reconnue qu’à des princes. M. le général de Grammont avait le sentiment profond de cette loi de toute constitution militaire, lorsque naguère, lavant l’armée du reproche d’avoir cédé aux révolutionnaires le 24 février, il appelait les soldats. – malgré les rugissemens de la montagne, — les défenseurs naturels du trône. La sécurité de l’armée, sa dignité, sa force, réclament donc la reconstitution d’un pouvoir permanent, et, en attendant, l’initiative forte, libre, incontestée, toujours prête et toujours prompte du pouvoir exécutif. À aucun prix, l’armée ne peut se laisser exposer pur des conflits de pouvoir, par l’incertitude de la responsabilité et la lenteur des ordres, à subir un second affront comme celui du 24 février.

Je peux me tromper, mais j’espère que personne au sein des partis monarchiques ne contestera la gravité des motifs par lesquels se justifie à mes yeux la politique du message. Si j’avais, au contraire, le bonheur d’avoir raison, les complications qui paraissaient obscurcir et menacer cette quatrième période de la révolution de février, où nous sommes engagés, se simplifieraient singulièrement pour les esprits droits et les consciences honnêtes. Je crois avoir serré d’aussi près que possible les nécessités supérieures de notre situation ; je n’en ai volontairement omis aucune ; je les ai ramenés à la mesure du possible. Nous les avons vues toutes converger à une seule conclusion : la nécessité de reconstituer le pouvoir dans la personne du prince Louis-Napoléon, et le devoir pour le parti modéré de continuer à prêter son concours à la politique du président tant que cette politique sera dirigée contre les révolutionnaires et les socialistes. Je prévois les objections qui peuvent accueillir de divers côtés cette manière de voir. Sur le premier point, le parti républicain objectera la constitution, qui interdit la réélection du président. L’union des trois partis monarchiques pourra prévenir cette objection en provoquant la révision de cet article de la constitution ; au surplus, dans le système de la souveraineté du peuple, le peuple est la constitution vivante ; les mêmes hommes qui revendiquent le droit d’insurrection en faveur du premier attroupement venu aurait mauvaise grace à contester à la nation, manifestant sa volonté par l’expression régulière du suffrage universel, le droit de casser un article de la constitution dont M. Marrast fut le Lycurgue. On pourra dire au nom de la majorité parlementaire que l’attitude prise par le président attente à la dignité de l’assemblée, et n’en ferait plus qu’un rouage secondaire dans l’état : si cela était, vrai, le