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Nous n’avons point parlé jusqu’ici du parti orléaniste. Est-ce que par hasard il n’a pas paru dans les débats qui ont précédé le 31 octobre ? Nous le regretterions, car nous sommes pour fa politique d’abnégation, mais non pour la politique de suicide. La conduite du parti orléaniste a été, ce nous semble, fort simple et fort naturelle. Elle s’est trouvée du même coup prudente et sage. Le parti orléaniste, en effet, n’a pas un autre principe que les gouvernemens qui se sont succédé depuis soixante ans en France : l’expression légale de la volonté nationale. Il n’attache pas absolument l’expression de cette volonté au suffrage universel, pas plus que ne le faisait l’empire lui-même, il ne croit pas que tout le monde doive voter dans le pays, afin que le pouvoir soit régulier ; il ne croit pas non plus que le gouvernement soit d’autant plus régulier, qu’il est l’expression d’un plus petit nombre. Avec ce principe, la parti orléaniste est à son aise pour demander l’abolition du bannissement des princes de la maison de Bourbon ; il ne nie pas le pouvoir de la loi française en général : il nie seulement la justice de la loi particulière du bannissement. De plus, tout en niant la justice de la loi, il admettait, ou du moins beaucoup de personnes dans son sein admettaient, que ce n’était pas encore le moment d’abolir cette loi. Le parti orléaniste obéissait, comme le parti légitimiste, à la force des choses, et, dans une discussion où chacun était amené nécessairement à professer son principe ou à le désavouer, il professait son principe ; mais il le professait, sans que ce principe eût rien de provoquant pour les pouvoirs établis, car il leur était analogue ; de plus, ce principe était professé sans impatience et sans calcul. Qu’on relise la discussion de la loi de bannissement, qu’on relise la discussion du douaire de Mme la duchesse d’Orléans, qu’on voie même la lettre que M. Vavin a publiée sur la liquidation de la liste civile du roi Louis-Philippe, car le hasard a voulu que ces trois incidens se succédassent à de courts intervalles, et que, pendant les quinze jours qui ont précédé le 31 octobre, il fût beaucoup question de l’ancienne famille royale. Quel a été le caractère de ces incidens ? ont-ils été provoquans ? ont-ils eu un air de conspiration ? Non assurément : tout le monde a parlé avec respect et avec affection de Mme la duchesse d’Orléans ; la montagne elle-même a rendu hommage à son caractère par la bouche de M. Lagrange, et, dans cet hommage, il n’y a eu aucune malice parlementaire faite contre le pouvoir présent : ç’a été un hommage simple et naturel. Un interrupteur anonyme s’est seulement scandalisé qu’on ait révélé une bienfaisante intention de Mme la duchesse d’Orléans et cela a, dès le lendemain, amené dans les journaux la révélation d’une nouvelle bonne action. À l’égard des princes, mêmes sentimens exprimés de la même manière, sans calculs et sans espérances. Enfin ce vieux roi, tant et si injustement calomnié, tant accusé d’avarice, il arrive un moment où sa fortune publique et sa fortune privée sont liquidées par ses adversaires, et il se trouve qu’au lieu de devoir être accusé d’avarice, c’est de prodigalité qu’il eût fallu l’accuser, si on peut appeler prodigalité dans un roi des dettes contractées pour achever et pour embellir les grands monumens et les grands souvenirs nationaux qui font la gloire de la France. Les trois incidens que je viens de rappeler ont eu plutôt l’air d’une enquête ouverte par le temps et le hasard en faveur de la vérité que d’une combinaison politique. Les témoignages impartiaux qu’a recueillis la famille d’Orléans ont justifié ses dix-huit ans de