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qui n’est, en réalité, qu’une nouvelle édition plus modifiée dans le sens de la liberté de tous les compromis qu’on a essayés depuis dix ans. D’une part, on accorde aux individus la liberté d’enseigner ; de l’autre, on veut tenir en lisière encore, en quelque mesure, l’usage de cette liberté. On veut réserver à l’autorité enseignante de l’état le droit de s’enquérir des actes de l’enseignement privé, le droit d’en contrôler les résultats par grades. Puis, comme il est assez évident que si ce droit était poussé à la rigueur, la liberté même y périrait, on modifie cette autorité elle-même, en lui associant des élémens qui lui sont étrangers et qui paraissent offrir des garanties à la liberté ; on crée des conseils supérieurs et des conseils académiques, où les membres des corps enseignans siègent à côté de membres libres, qui sont censés représenter l’enseignement privé. On veut associer de même, dans les commissions qui confèrent les grades, aux juges pris dans l’Université même, d’autres examinateurs moins suspects de prédilection et de préjugés. On coupe des deux parts le différend par la moitié on constitue une autorité partagée pour présider à une demi-liberté. Regardez au fond de toutes les lois proposées ou discutées : qu’on fasse la part plus ou moins grande à l’un ou l’autre des élémens, c’est toujours là le procédé qu’on emploie ; c’est le jugement de Salomon qu’on applique au procès de l’Université et de la liberté d’enseignement.

Encore un coup, nous comprenons comment, dans l’état présent de l’éducation publique, on en est réduit à de pareils expédiens. Le malheur c’est que d’ordinaire, ne satisfaisant personne et ne soutenant pas une discussion régulière, ils succombent au dernier moment devant l’opposition combinée des deux intérêts qu’ils blessent en prétendant les concilier, et au fond l’un ni l’autre n’ont absolument tort. Qu’est-ce d’une part, en effet, qu’une autorité enseignante qui ne peut agir, même dans la sphère de l’enseignement public, même pour ses attributions les plus essentielles, sans être mise en quelque sorte en suspicion légale, et tenue en échec dans son propre sein par des élémens étrangers et même souvent hostiles ? C’est une autorité frappée de mort qui ne tardera pas à se décourager d’elle-même. Nous sommes d’avis, sans doute, qu’il est naturel d’admettre dans les conseils supérieurs de l’enseignement des représentans de toutes les fonctions éminentes et de toutes les professions élevées de la société et particulièrement de la religion ; mais il y a loin de là au conseil supérieur qu’on nous propose aujourd’hui, composé de différentes délégations armées de mandats impératifs et investies de droits égaux, sans direction supérieure pour les contraindre ou les dissoudre. Cette machine nous paraît de difficile manœuvre, et nous éprouvons une curiosité impatiente de la voir en marche, pour savoir si elle pourra faire un pas. Il en est de même des commissions mixtes pour la collation des grades, qui, si elles ne sont pas dans la loi nouvelle, font partie d’un système