Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 4.djvu/714

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la jeunesse, nous avons poussé la témérité jusqu’à dresser nous-même le plan d’une éducation supérieure qui peut satisfaire et nourrir les intelligences. Enfin, pour arrêter la course effrénée des générations vers Paris, nous proposons à la fois, et de remettre aux autorités du département même l’entrée de presque toutes les carrières publiques, et de créer des centres scientifiques et littéraires correspondant aux diverses régions de la France et animés de leur esprit.

Ces moyens sont-ils suffisans ? Sont-ils inutiles ? Ne proposons-nous pas trop d’innovations ? N’avons-nous pas trop de respect pour l’état actuel des choses ? Toutes ces questions, à la suite desquelles viennent autant de reproches, nous seront faites, nous le savons, et nous avouons que nous les méritons indistinctement. Essayons un peu d’y répondre en deux mots par avance. Ces remèdes seraient suffisans, nous le pensons, si tous les maux de la France tenaient uniquement à son système d’éducation, si son histoire passée, si son administration générale, si mille causes qu’il serait impossible de connaître et surtout d’énumérer n’y étaient pas pour leur grande part ; mais comme nous avons dit cent fois qu’il n’en était rien, et que l’Université, ainsi que tous nos autres grands corps, est autant dépravée par l’atmosphère qu’elle respire que par ses vices organiques, il ne nous en coûte rien de convenir qu’à eux tout seuls nos plans sont loin d’être suffisans. D’autre part, nous les tiendrions pour inutiles, si nous partagions la disposition, si commune aujourd’hui, à croire que les sociétés sont placées sur des pentes fatales où la nain de Dieu les pousse sans qu’elles puissent jamais ni remonter ni se retenir ; mais, comme sous prétexte d’honorer la Providence, ce système fataliste lui fait, suivant nous, le plus cruel outrage en contestant son plus bel ouvrage, qui est la liberté humaine, comme nous croyons que Dieu châtie le désespoir et récompense l’effort désespéré, sans nous exagérer le résultat, nous voudrions voir mettre la main à l’œuvre. En second lieu, si nous croyions que l’Université actuelle ne contient rien de bon dans son sein, qu’elle est corrompue du chef jusqu’à la racine, nos projets seraient beaucoup trop timides ; il faudrait la jeter au loin sans tarder, et la France avec elle apparemment, car l’Université, convenons-en, ressemble à la France à s’y méprendre. Enfin, si l’Université, au contraire, était l’arche sainte que pensent certains de ses partisans, s’il n’y avait réellement aucun tort à lui reprocher, nous serions coupable d’une extrême témérité, et il ne nous resterait plus qu’à rechercher pourquoi, étant si bonne, l’Université a été si impuissante et nous a fait don de la société que nous avons. C’est entre ces dispositions extrêmes (partant cependant du même fonds) à tout demander et à ne rien tenter, à tout détruire ou à tout garder, que nous avons essayé de nous placer. On jugera si nous avons réussi.

En tout cas, ce qui nous attache surtout à nos idées, c’est que nous