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ne se plaçaient entre l’intérêt du roi et le sien. De la sorte, il demeura éloigné des intrigues qui ne cessèrent malheureusement de déchirer la cour de Charles.

Entre les premiers témoignages de la confiance que Rupert inspira tout de suite aux cavaliers, je trouve avec plaisir une lettre de la comtesse de Derby, écrite en français. La comtesse de Derby était une La Trémouille elle fut une des héroïnes de cette guerre. Voici ce que la Vendéenne anglaise disait à Rupert, à peine arrivé à Nottingham :


« Monseigneur,

« Il n’y a personne qui ait eu plus de joie de votre arrivée en ce pays que moi, et qui ait plus craint les dangers que vous pourriez courir par le comte de Warwick, dont Dieu vous a délivré, j’espère, pour le service du roy et le bien de ce royaume, qui sera bien misérable depuis l’approche de la révolte, et que l’on fait courir le bruit de quelque retraite des gens de sa majesté. Cela a enflé le courage des séditieux tellement que je ne crois pas que l’on les puisse désarmer, s’il ne plaisoit au roy d’envoyer quelques compagnies de cavalerie en cette province, qui seroit un grand avantage pour le service de sa majesté. Par ce moyen, l’on n’aura besoin de retenir ces compagnies de cavalerie que pour fort peu de temps, et l’on pourroit lever et armer des gens de pied pour le service du roy, ce que je crains ne se pourra faire sans cela, car l’on aura assez affaire de se défendre des ennemis de dedans notre pays, et je ne sais comment s’y peut demeurer avec sûreté sans cette assistance, qui pourra servir à assurer toutes ces provinces à sa majesté, ce qui ne sera pas de peu de conséquence. Pardonnez à ma liberté et à la hardiesse que je prends ; mais l’honneur que j’ai de vous appartenir la donne, et j’espère tout en votre générosité que vous avancerez cette affaire avec le plus de diligence que ce pourroit être.

« Votre très humble et très obéissante servante,

« Charlotte de la Trémouille.

« À Ladom, ce 31 d’oust 1641.

« À monseigneur, monseigneur le prince Ruper. »


Le parlement avait mis à la tête de ses troupes le comte d’Essex. Rupert, s’étant un peu approché avec sa cavalerie de l’armée du comte, lui envoya un trompette avec la lettre suivante. Ce défi à la manière des temps chevaleresques montre le caractère de Rupert et ouvre dignement la campagne.


« Mylord,

« J’apprends que vous êtes général d’une armée envoyée, de l’accord des deux chambres du parlement, sous prétexte de soumettre quelques personnes malignantes dans ces quartiers ; mais nous craignons que vous ne visiez à un pouvoir plus haut, à savoir, la souveraineté. Si tels sont vos desseins, donnez-m’en le moindre avis, et serai prêt, pour l’aide du roi, à vous rencontrer en un lieu choisi, à Dunsmore-Heath, le 10 octobre prochain. Ou, si vous pensez que ce soit trop de peine et de dépense de mener là vos forces, je suis disposé, pour ma part, à recevoir de vous, à votre gré, satisfaction particulière en un