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il s’éloigna de l’opposition à mesure qu’il découvrit sa passion, sa mauvaise foi, ses pernicieux desseins. Son ami Hyde, depuis lord Clarendon et le grand historien de la guerre civile, dit qu’il fit tout cependant pour éloigner de lui la faveur de la cour, tout, excepté ce qu’il fallait pour ne la point mériter. Lorsque le roi le voulut nommer secrétaire d’état, il refusa d’abord nettement ; il accepta ensuite pour deux raisons d’une exquise délicatesse : premièrement, il eut peur que son refus ne jetât de la défaveur sur les affaires du roi ; secondement, il ne voulut pas avoir l’air de craindre de faire une chose déplaisante à la majorité démagogique des communes. Hyde et Colepepper avaient moins d’élévation et de noblesse dans le caractère ; mais leur renommée parlementaire, leur talent, leur éloquence, étaient, pour la cause royale, une imposante garantie de légalité et un lustre politique.

Il y a toujours dans les partis des caractères malades de je ne sais quelle hypocondrie : enrôlés dans une cause, ils n’en voient plus que les inconvéniens, les faiblesses, les perspectives noires. Quelques hommes de ce naturel étaient parmi les cavaliers, mais en petit nombre. Leurs défiances, leurs doutes, expriment assez bien les tortures qu’éprouvent les esprits médiocres et les consciences timides dans les crises qui n’admettent plus que deux partis tranchés. De ceux-là était le comte de Sunderland : c’était un très honnête homme, qui avait choisi la cause royale comme un pis-aller. Il écrivait à sa femme, un mois après la levée de l’étendard : « Mon cher cœur, la cause du roi a beaucoup gagné dans ces derniers temps ; ses forces s’accroissent journellement, ce qui augmente l’insolence des papistes. Combien je suis mécontent des procédés qu’on suit ici, je l’ai assez dit dans plusieurs de mes lettres ; il ne manquerait pas chaque jour de belles occasions pour se retirer, si ce n’était la question d’honneur, car l’occasion ne sera jamais si belle, à moins qu’on ne fût décidé à combattre du côté du parlement (pour ma part, j’aimerais mieux être pendu), — qu’on n’attribuât votre retraite à la peur. Si l’on pouvait trouver un expédiens pour sauver le point d’honneur, je ne demeurerais pas une heure ici. » À cet esprit chagrin je préfère la tristesse du chevalier maréchal sir Edmund Varney, qui devait représenter aussi les sentimens de plusieurs de ses compagnons d’armes. Sir Edmund Varney était un brave gentilhomme, universellement aimé. Après la levée de l’étendard, il disait à Hyde, à Nottingham : « Je suis heureux de vous voir, au milieu des angoisses qui oppressent l’esprit de tant de gens, conserver encore votre vivacité naturelle et votre bonne humeur. Vous connaissez mieux que personne la condition du roi et celle du parlement ; aussi j’espère que vous pourrez procurer à ses amis quelque consolation qui relève leurs esprits. Quant à moi, ajoutait-il en souriant, je voudrais de grand cœur faire comme vous ; mais