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ensuite par le taux de l’impôt, qui est de demi pour mille pour les fortunes de 5,000 à 50,000 florins, et d’un pour mille au-dessus.

En Angleterre, les revenus inférieurs à 150 livres sont affranchis de l’income tax. Cela s’explique par la situation de l’aristocratie tant industrielle que foncière, qui, ayant joui trop long-temps elle-même d’une véritable exemption d’impôt, devait une revanche et une compensation aux classes laborieuses. L’assiette de l’income tax suppose ainsi un sacrifice volontaire d’argent et de principes de la part de ceux qui possèdent, et pourtant cet impôt entraîne de telles conséquences qu’il est douteux que l’on puisse le maintenir.

L’impôt du revenu en Bavière est complètement progressif. Cette taxe ne pèse pas sur les célibataires qui ont moins de 250 florins de revenu, sur les familles avec trois enfans au plus, dont le revenu demeure inférieur à 400 florins, enfin sur les familles qui ont moins de trois enfans, si elles ont moins de 500 florins de rente. Les revenus imposables sont distribués, en vingt-cinq classes, dont la première (250 florins de revenu) paie 2 pour 1,000 ; la quinzième (10,000 florins de revenu) 1 pour 100, et la dernière (75,000 florins de revenu et au-dessus) 2 pour 100. On remarquera que la loi bavaroise est une des plus récentes et qu’elle a à peine quinze mois de date. C’est celle qui porte au plus haut degré l’empreinte des circonstances, celle qui a poussé le plus loin la logique de doctrines, et ce n’en est pas encore le dernier mot.

Enfin n’oublions pas que M. Goudchaux, en proposant une taxe sur le revenu mobilier, l’avait accompagnée d’un projet de loi sur les successions qui proclamait ouvertement et qui appliquait le système de l’impôt progressif.

Oui, l’impôt progressif est au bout de l’impôt sur le revenu. Il en représente la fatalité. Aveugle qui ne la voit pas, et insensé qui la dissimule. Ce n’est pas ici le lieu de discuter l’impôt progressif ; il suffit d’en rappeler la portée. Les taxes progressives attaquent le capital lui-même, dont elles préviennent la formation ou dont elles détruisent les réserves accumulées. Par cette méthode, l’impôt égale bien vite et absorbe le revenu. Il fait que le contribuable, au lieu de rechercher l’aisance, a intérêt à être pauvre. En tarissant les sources des revenus particuliers, il dessèche celle du revenu public. L’idéal de la loi agraire se trouve réalisé, car l’impôt étend alors sur tous les citoyens un niveau commun de misère, et cette égalité-là n’est pas de celles qui engendrent l’ordre et la paix.

Je crois en avoir dit assez pour établir que le projet de M. le ministre des finances est antipathique à notre état social, et qu’il contient en germe une l’évolution, tout en affectant les proportions plus modestes d’une réforme. L’opinion publique a déjà condamné par deux fois l’impôt