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ont été opérées en 1838 : l’une de 5 millions pour fournir les fonds des premiers travaux publics, l’autre de 27 millions pour mettre en équilibre les budgets de 1834 et des exercices suivans.

Tel est donc l’ensemble des ressources que le crédit a fournies au dernier gouvernement. Si en définitive il a inscrit 20 millions de rentes nouvelles[1], s’il a disposé de 32 millions de rentés sur les économies du passé, il a largement désintéressé l’avenir par des travaux d’une valeur plus grande encore et dont l’avenir doit hériter. — Après avoir retracé l’ensemble de cette situation financière, indiquons-en les détails les plus importans.

Les commencemens de tout nouveau gouvernement sont difficiles et dispendieux. Les difficultés se compliquent et les dépenses s’aggravent lorsque le gouvernement qui s’établit hérite d’une révolution ; les résistances du dedans, les défiances du dehors, exigent de lui des précautions extraordinaires. Il faut qu’il se montre supérieur à toutes les attaques pour les éviter. Telle fut, pendant les trois premières années de son existence, la situation de la monarchie de 1830. Elle n’eut point pour auxiliaire le concert des rois comme la restauration, ni l’insurrection des peuples comme la république ; la guerre civile et la guerre étrangère pouvaient éclater à la fois. Pour dissiper les préventions de l’Europe, pour désarmer les ressentimens des partis, ce n’était pas trop de la force unie à la sagesse. Ni la force ni la sagesse ne manquèrent à cette œuvre, et elles l’accomplirent pacifiquement. Ce sera la gloire du gouvernement de juillet, et, pour parler comme l’histoire, ce sera surtout la gloire du roi Louis-Philippe d’avoir voulu la paix avec persévérance et de l’avoir maintenue avec dignité. Les armemens extraordinaires ne pesèrent que passagèrement sur nos finances : de 1831 à 1834, les désarmemens successifs qui ramenèrent l’effectif au pied de paix firent descendre les dépenses du ministère de la guerre de 386 millions à 255 millions[2], et plus tard même à 210 millions, et le grand livre de la dette publique, qu’il fallut bien ouvrir pour faire face à de telles dépenses, fut ensuite fermé, sauf pour les grands travaux publics.

Nous avons vu une seconde révolution, nous sommes encore dans la crise financière de son établissement. Nous pouvons calculer les charges qu’elle a imposées au trésor et prévoir celles qu’elle doit lui imposer encore. Nous pouvons enfin mesurer les pertes qu’a entraînées dans les fortunes privées la perturbation de la fortune publique. C’est un rapprochement fertile en utiles enseignemens que de comparer sous ce point de vue la révolution de juillet et la révolution de février.

  1. Le dernier emprunt de 250 millions, contracté le 10 novembre 1847, est compris dans ce chiffre.
  2. Compte des finances pour 1847, page 373.