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au point de vue religieux que comme un acheminement au rétablissement du catholicisme. Les faveurs qu’elle accordait aux sectes dissidentes furent regardées comme une amorce par laquelle on voulait les entraîner dans une alliance avec les catholiques contre l’église établie, mais dont elles deviendraient victimes après le triomphe du catholicisme. Alors on vit le roi et le clergé anglican rivaliser d’avances, de flatteries, de promesses vis-à-vis des puritains. L’église l’emporta dans cette lutte. La déclaration d’indulgence n’endormit pas l’hostilité des puritains contre Jacques : la plupart déclarèrent qu’ils aimaient mieux rester sous le coup des lois pénales que de se fier à la liberté suspecte accordée inconstitutionnellement par leur ancien persécuteur. Au sein du clergé anglican, le soulèvement fut unanime. Les théologiens de l’église anglaise sentirent s’ébranler dans leurs cœurs, sinon encore dans leur esprit, leurs doctrines sur le droit divin des rois et le devoir de l’obéissance passive pour les sujets. Jacques II les convertit bientôt aux idées de résistance légale. Il fit une seconde déclaration d’indulgence, et ordonna qu’elle serait lue dans toutes les chaires du royaume. Une vaste opposition s’organisa par enchantement contre l’exécution de cet ordre. L’archevêque de Cantorbéry, Sancroft, et six évêques, ses suffragans, réunis à Londres, adressèrent à Jacques une pétition mémorable. Toute idée de rébellion et d’intolérance y était repoussée. On assurait le roi que l’église serait, comme elle l’avait toujours été, fidèle au trône. Les évêques déclaraient qu’au moment voulu, comme lords du parlement, ils étaient prêts à montrer leurs sympathies pour les scrupules consciencieux des dissidens ; mais, ajoutaient-ils, le parlement, sous l’ancien roi et sous le règne actuel, avait déclaré que le souverain n’avait pas le droit constitutionnellement d’exempter ses sujets de l’observation des statuts en matière ecclésiastique. La déclaration d’indulgence était donc illégale, et la prudence, la conscience et l’honneur ne permettaient pas aux pétitionnaires de s’associer à la publication d’une déclaration illégale dans la maison du Seigneur et durant le service divin. Jacques II, irrité de cette protestation inattendue, la traita de révolte, et appela les évêques trompettes de sédition. La pétition fut imprimée, répandue le jour même dans tous les cafés de Londres, et jetée dans le pays par milliers d’exemplaires. Jacques la fit poursuivre comme un libelle. Les évêques furent envoyés à la Tour. Ils furent acquittés par le jury aux acclamations enthousiastes de toute l’Angleterre.

Jacques, fidèle à son caractère, se raidit contre sa défaite. Il ne s’était point contenté de soutenir les prérogatives les plus exorbitantes de la royauté ; il avait essayé de se procurer la force militaire qui avait manqué à ses prédécesseurs. Il était parvenu à organiser une armée de vingt mille hommes. Il avait également cherché à former des régimens en Irlande, où il se croyait plus assuré de trouver dans une population