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assises de sinistre mémoire qui ont gardé dans l’histoire le nom d’assises sanglantes.

Alors Jacques commença de travailler à la réalisation de ses desseins en faveur du catholicisme et de se servir de la prérogative royale contre les lois. Il existait encore des lois pénales terribles contre les catholiques : elles dormaient dans le Statute Book ; mais deux lois récentes avaient frappé le catholicisme d’incapacité civile et politique. Le Test-Act excluait des fonctions quiconque n’adhérait pas à l’église d’Angleterre ; une autre loi fermait l’entrée du parlement à quiconque n’abjurait pas la doctrine de la transsubstantiation. La crainte et la haine que les catholiques inspiraient alors à la nation anglaise étaient sans doute en elles-mêmes d’absurdes et odieux préjugés ; cependant elles étaient un fait. Le peuple anglais, non-seulement la foule, mais les hommes éclairés et libéraux, croyaient que les catholiques romains, toutes les fois que l’intérêt de la religion était en jeu, se considéraient comme affranchis des lois ordinaires de la morale et regardaient même comme un acte méritoire de les violer. Malheureusement des conspirations catholiques et les principes soutenus par ceux qui s’y étaient engagés avaient prêté des fondemens à cette opinion. Aux yeux des Anglais du XVIIe siècle, les catholiques étaient des hommes qui se seraient servis de la liberté pour tuer les libertés anglaises. Un grand théologien de ce temps, un homme d’un caractère doux et tolérant, Tillotson, déclarait, en 1678, dans un sermon prêché devant la chambre des communes, que « dans son jugement, des païens qui n’auraient jamais entendu prononcer le nom du Christ et qui ne seraient guidés que par les lumières naturelles seraient des membres plus sûrs de la société civile que des hommes formés dans les écoles des casuistes papistes. » Assurément les lois qui opprimaient les catholiques étaient odieuses, les défiances qui les poursuivaient étaient injustes ; mais ces défiances étaient ressenties par la nation entière, et dans les pays libres, suivant l’énergique parole de Mirabeau quand tout le monde a tort, tout le monde a raison. Il n’y avait qu’un moyen de servir les catholiques : c’était de désabuser l’opinion, et cela eût été facile à un roi, catholique lui-même, qui se serait montré scrupuleux observateur des lois et protecteur des libertés publiques. Il y avait une autre manière de travailler pour eux : c’était d’éluder par la ruse ou de briser par la force les lois qui les enchaînaient ; mais, en agissant ainsi, l’on donnait raison au préjugé qui les proscrivait, et l’on envenimait contre eu l’acharnement de l’opinion. Ce fut ce moyen qu’employa Jacques II.

Il prit au mot les doctrines de l’église anglicane sur le droit divin des rois, le devoir de la soumission et le crime de la résistance au prince ; il crut que l’église serait la première à pratiquer ses maximes, et qu’il pouvait compter sur sa patience et sa docilité. Comme roi, d’ailleurs, il avait la suprématie ecclésiastique ; il crut encore pouvoir