Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 3.djvu/799

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Avec sa finesse ordinaire, Hamilton, dans les Mémoires du Chevalier de Grammont, attribue cette résolution de Jacques II « aux remords d’une conscience dont la délicatesse commençait à lui vouloir du mal. » En se faisant catholique, au risque de perdre sa couronne, le duc d’York sacrifia d’une façon bien plus grave ses intérêts temporels ce qu’il considérait comme l’intérêt de son ame et le devoir de sa conscience. S’il n’eût pas été catholique, la révolution de 1688 n’aurait point eu lieu. Roi catholique d’un pays protestant où le catholicisme était persécuté, il regarda comme un devoir de conscience d’y rétablir le catholicisme et de faire cesser la persécution de ses coreligionnaires. La petitesse d’esprit de Jacques II ne lui laissa voir qu’un moyen d’arriver à ce but, s’emparer, au nom de la dignité royale, du pouvoir absolu. Imbu de toutes les idées favorables aux prérogatives de la couronne Jacques II était poussé par l’intérêt le plus puissant, la foi religieuse à soumettre violemment à ces prérogatives les résistances qu’y pouvaient opposer les libertés anglaises. Son parti une fois pris, Jacques II courut à sa fin avec un aveuglement et une obstination que rien ne put éclairer ou arrêter.

Il était entouré d’une cabale formée d’esprits violens qui excitaient son entêtement, de courtisans infatués, légers, aventureux, qui flattaient ses aspirations de royauté absolue, d’hommes serviles qui fournissaient des instrumens prompts et cruels à ses volontés despotiques. Parmi les premiers, le plus influent sur l’esprit du roi était le jésuite Petre. La majorité des catholiques anglais, et surtout les plus respectables par leurs vertus, étaient loin d’approuver la politique outrée de Jacques II en leur faveur. Ils sentaient que les témérités du roi soulevaient contre eux une impopularité passionnée dans le pays ; ils redoutaient d’attirer sur eux des représailles oppressives, lorsque l’appui de Jacques viendrait à leur manquer. Le pape lui-même partageait ces craintes et cette prudence. Il conseillait à Jacques la modération et la temporisation. Son nonce, Adda, appelait les conflits du roi et du parlement au sujet du catholicisme : una gran disgrazia. Malheureusement la coterie exaltée de la cour combattait victorieusement ces sages avis. L’homme de cette nuance qui avait le plus d’empire sur Jacques était le jésuite Petre, homme distingué, habile courtisan, dont le zèle amorce d’ambition visait au chapeau de cardinal. Il était soutenu par des hommes de cour qu’une longue familiarité avait établis dans la confiance de Jacques, tels que lord Castlemaine, mari de la maîtresse la plus dévergondée de Charles II ; Jermyn, qui avait été l’amant le plus favorisé de cette femme et un des héros du livre d’Hamilton ; Talbot, qui remplit égale bien une grande place dans ce galant récit des aventures amoureuses de Whitehall, celui qui fut le mari de la belle Jennings. Maintenant que l’âge des plaisirs était passé, ces seigneurs transportaient sur un