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gloire ; elle avait resserré ses liens avec l’église et avec les Stuarts dans une commune souffrance. Le cavalier se souvenait que, tandis que les soldats de Cromwell brûlaient son château, des sectaire sacrilèges profanaient l’église voisine, et de féroces rebelles faisaient tomber le tête de Charles Ier. Du reste, malgré la ferveur de son loyalisme, il ne faut pas croire que le tory eût la servilité de caractère qui s’incline sous le despotisme : même en chargeant les têtes-rondes, sous les ordres du terrible prince Rupert, le cavalier restait fidèle à sa nature d’Anglais ; il aimait autant que le puritain sa liberté personnelle et ses droits politiques. Les hommes les plus intelligens du parti, tels que Falkland, Clarendon, Colepepper, avaient commence par attaquer les usurpations du pouvoir royal ; ils ne se rallièrent à la cause de Charles Ier que le jour où ils virent l’opposition s’emporter à la fougue de renversement qui détruisit l’ancienne constitution, et livra le pays d’abord à l’anarchie, puis au despotisme d’un soldat. L’amour de l’église, la fidélité aux droits légitimes du roi, la haine de tout ce qui rappelait la république, et surtout des troupes régulières et des armées permanentes qui les avaient tant opprimés sous Cromwell : voilà les sentimens que rien n’avait pu déraciner du cœur des tories à l’avènement de Jacques II.

Le personnel des têtes-rondes, devenu le parti whig sous la restauration, était formé des petits propriétaires de campagne, surtout des négocians et des boutiquiers des villes, et de la minorité de l’aristocratie, ayant à sa tête quelques-unes des plus riches et des plus puissantes familles du pays. Ce parti ralliait toutes les sectes protestantes qui n’adhéraient pas à l’église établie ; il haïssait surtout le papisme, et reprochait à l’église anglaise d’avoir conservé une multitude de superstitions romaines. Les puritains de la première génération se précipitaient sur la pente entraînante des innovations religieuses ; poussant jusqu’au délire la première ivresse de l’émancipation de l’esprit, les plus exaltés, qui furent un moment les plus forts, prenaient pour des révélations du Saint-Esprit les plus furieuses rêveries, et cherchaient le prétendu règne du Christ dans des systèmes aussi monstrueux que ceux que, deux cents ans après, nous avons vus fermenter dans le matérialisme infect des socialistes. Dans leur triomphe, ils se rendirent odieux au sentiment national par leur sacrilège mépris pour les traditions du passé, par leur intolérance religieuse, par la violence qu’ils voulurent faire aux mœurs. Ils réglaient leurs pensées, leur langage, leur vie sur l’Ancien Testament. Ils se baptisaient de noms de patriarches, discouraient comme des prophètes en colère, s’habillaient et gesticulaient comme des pharisiens, et, la pique ou le mousquet an mains, besognaient comme l’ange exterminateur. On reconnaissait un puritain à ses métaphores bibliques, à la sévérité affectée de son costume