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le prestige qui avait protégé la royauté aux yeux des puritains s’évanouit. Jacques avait eu affaire aux presbytériens en Écosse ; il les détestait. Il embrassa les doctrines de l’église établie avec un empressement et une faveur intéressés. Puéril, vain, entêté, bavard, écrivailleur, pédant, il s’érigea en docteur de l’anglicanisme et en tira les plus fastueuses théories du droit divin. Il laissa, en mourant, la royauté infatuée en présence de la résistance irritée, et le conflit religieux aussi imminent que le conflit politique.

Et ici, avant de commencer l’examen de la grande bataille du XVIIe siècle, qu’on me permette une réflexion préliminaire. Rien n’est plus difficile à juger dans l’histoire que les révolutions ; cela vient de la confusion qui s’établit non seulement pour les contemporains, mais pour la postérité entre les causes des révolutions, la légitimité des principes qu’elles font triompher, la nécessité irrésistible en apparence des événemens par lesquels elles s’accomplissent, le caractère, les vertus, les vices, les intérêts, les passions des hommes qui y prennent part. De là mille contradictions dans les jugemens qu’on porte sur les révolutions. Par exemple, si l’on ne regarde qu’aux idées qui dominent ces grandes luttes et aux causes qui en décident l’issue, il semble que les vaincus doivent être toujours condamnés aveugles pour s’être élevés contre ce qui était inévitable, criminels pour avoir combattu ce qui est devenu légitime. Cependant il arrive plus souvent que le préjugé populaire demeure favorable aux vaincus. Il n’y a pas un seul Anglais qui regrette les résultats de la révolution du XVIIe siècle, pas un seul qui, au contraire, ne les contemple avec reconnaissance et avec fierté ; pourtant, jusqu’à ce jour, la cause des Stuarts a conservé, en Angleterre, les sympathies de l’imagination et du sentiment. Les historiens et les hommes politiques s’étonnent parfois de cette contradiction ; ils la trouvent injuste ; ils croient leur conscience engagée à la redresser. Ils regardent comme un devoir de prouver la culpabilité des vaincus et de les dépouiller, même après des siècles, de l’intérêt pieux qui poétise leur infortune dans la mémoire des peuples. M. Macaulay, je dois le dire, s’est laissé offusquer par cette préoccupation. Il a voulu ramener la sympathie et le prestige sur le parti qui a eu raison, qui a été le plus fort, qui a triomphé ; il a voulu arracher aux Stuarts, à Jacques II surtout, en les accablant sous la démonstration de leurs fautes, la seule chose qui leur soit restée, la vague pitié des souvenirs. Le point de vue général de son livre y a souvent perdu l’élévation impartiale et sereine de l’histoire ; le ton de son récit y a pris quelquefois les allures acrimonieuses et chicanières du plaidoyer. On dirait que M. Macaulay se croit obligé de gagner encore la cause des Whigs de 1688 contre les partisans des Stuarts. Des amis de M. Macaulay l’ont félicité de l’ardeur et de la verve qu’il a déployées pour enlever