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amenaient une intervention étrangère, voici ce que dès aujourd’hui (27 septembre 1847) je plus vous dire : Ne laissez au pape aucun doute qu’en pareil cas nous le soutiendrions efficacement, lui, son gouvernement et sa souveraineté, son indépendance, sa dignité. » En parlant ainsi en 1847, M. Guizot écrivait par avance l’histoire de notre intervention de 1849. Il en marquait également le but ; c’est-à-dire des réformes libérales également opposées à l’esprit stationnaire et à l’esprit révolutionnaire.

Ces réformes ont déjà été entreprises en 1831, et il est curieux d’examiner les édits que le pape Grégoire XVI fit au commencement de son pontificat. Nous les avons sous les yeux, non pas que nous voulions les prendre pour le maximum des libertés romaines, mais nous les prenons volontiers pour minimum, et nous ne concevrions pas qu’on pût, en 1849, accorder aux Romains moins qu’on ne leur accordait en 1831.

Ces édits n’émanaient pas seulement de l’autorité pontificale ; ils émanaient des conseils de l’Europe. Une conférence des ministres des puissances catholiques réunis à Rome avait indiqué dans un memorandum resté célèbre, le memorandum du 21 mai 1831, les réformes que l’Europe demandait à la papauté en faveur des populations romaines. Les principes qui paraissaient devoir servir de base aux réformes du gouvernement pontifical étaient : 1° l’admissibilité générale des laïques aux fonctions administratives et judiciaires ; 2° des conseils municipaux électifs ; 3° un conseil central, composé de députés nommés par les conseils provinciaux et destiné surtout à surveiller l’administration financière de l’état ; à côté de ce conseil central, un conseil d’état.

Le premier édit de Grégoire XVI, celui du 1er juin 1831, répondait au premier principe posé par la conférence de Rome, l’admission des laïques à tous les emplois. C’était l’édit relatif à l’administration des quatre légations. Il instituait des juntes de gouvernement composées de quatre membres, tous laïques et ayant voix délibérative. C’était une véritable révolution à Rome qu’un pareil édit ; aussi le cardinal Bernetti, premier secrétaire d’état, dont l’influence avait fait rendre cet édit et les suivans, y gagna auprès de ses collègues le nom de Lafayette du saint-siège. Cette dénomination, qui peut faire sourire, avait pourtant quelque chose de juste. Le cardinal Bernetti avait vraiment fait une révolution à Rome en admettant les laïques au partage du pouvoir avec les ecclésiastiques. Quand le pouvoir passe des mains d’une classe dans une autre, c’est là en effet une révolution. Les cardinaux ennemis du cardinal Bernetti n’avaient donc pas tort de voir que l’admission des laïques était une révolution. Ils avaient tort seulement de ne pas voir que c’était une révolution inévitable que celle que demandait l’Europe et que favorisait l’Autriche elle-même. Ce qui était inévitable en 1831 l’est-il moins en 1849 ? Le pape Pie IX peut-il faire moins que n’avait fait Grégoire XVI.

L’édit du juillet 1831 sur l’organisation communale et provinciale consacrait d’une manière plus décisive encore l’admission des laïques, et les faisait entrer en plus grand nombre dans l’administration publique. Des conseils municipaux de quarante huit, trente-six et vingt-quatre membres étaient établis dans les villes de dix mille, quatre mille et mille habitans. Les villes et villages d’une population inférieure avaient un conseil de neuf membres. La première nomination des conseillers devait être faite dans chaque province par le légat et