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En Angleterre, la télégraphie électrique n’a pas fait de moins rapides progrès qu’aux États-Unis.

La plupart des lignes de télégraphie électrique qui fonctionnent aujourd’hui sur les chemins de fer anglais ont été créées par M. Westheaone. Le nom de ce savant mérite une place à part dans l’histoire de la grande invention qui nous occupe. S’il n’est pas authentiquement prouvé qu’il ait le premier conçu l’idée de la télégraphie électro-magnétique, on ne peut contester cependant qu’il ne l’ait le premier portée dans la pratique. C’est à M. Westheaone qu’appartient en effet l’honneur d’avoir le premier rattaché deux villes entre elles par un lien de correspondance électrique. Ce qu’on lui contestera moins encore, c’est d’avoir fondé la théorie scientifique de ces phénomènes et d’avoir élevé les procédés pratiques de cet art nouveau à un degré de perfection remarquable.

M. Westheaone, l’un des physiciens les plus distingués de notre époque, fut conduit à l’invention de ses appareils télégraphiques par les expériences qu’il fit en 1834 sur la vitesse de transmission de l’électricité. Il s’assura que cette vitesse est de 333,800 kilomètres par seconde, ou, si l’on veut ; que l’électricité pourrait faire, dans l’espace d’une seconde, huit fois le tour du globe. Pour faire ces expériences, il avait employé des fils de plusieurs milles. Les effets produits par l’électricité sur d’aussi grands circuits lui prouvèrent que les communications télégraphiques par l’électricité étaient non seulement possibles, mais très praticables. Il se mit donc à rechercher les appareils les plus convenables pour réaliser son projet et arriva bientôt aux résultats les plus satisfaisans.

Le premier télégraphe construit par M. Westheaone fut établi, en 1838, sur une partie du chemin de fer de Londres à Liverpool. Ce télégraphe était fondé sur le principe de la déviation des aiguilles aimantées par l’influence du courant voltaïque. Il employait cinq fils qui servaient à faire apparaître instantanément les diverses lettres de l’alphabet. L’emploi de cinq fils conducteurs était une complication sérieuse et une aggravation de dépenses. Aussi, ce système fut-il bientôt abandonné par l’inventeur, qui construisit de nouveaux appareils fondés sur le principe de l’aimantation temporaire par les courans électriques. Le nouveau système télégraphique de M. Westheaone a été établi en 1840 et fonctionne aujourd’hui sur quelques lignes anglaises. Il porte le nom de télégraphe à cadran. On peut dire sans trop de risques que c’est la perfection du genre. Comme les détails de construction mécanique nous bornerons à faire connaître les principes sur lesquels repose le jeu de cet admirable instrument.

Aux deux extrémités de la ligne télégraphique, on place deux cadrans circulaires parfaitement semblables et qui portent écrits sur leur circonférence les vingt-quatre lettres de l’alphabet et les dix chiffres de la numération. Ces deux cadrans communiquent entre eux par le fil conducteur de la pile. À l’aide de dispositions mécaniques convenables, chacune des lettres des cadrans peut se détacher du cercle et venir se placer au-devant d’une sorte d’indicateur qui permet de la lire. Ces deux cadrans sont liés entre eux de telle manière, que les mouvemens qui s’exécutent sur l’un des appareils sont répétés exactement et au même instant par l’autre. D’après cela, si, à la station d’où partent les dépêches, on amène successivement, les diverses lettres de l’alphabet devant l’indicateur, les mêmes lettres se détachent instantanément sur le cadran place à station