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journée, le général Rye, dont le talent s’était révélé dans cette guerre et donnait les plus belles espérances, est resté lui-même sur le champ de bataille. Sous le coup de cet événement si honorable pour l’armée danoise, un armistice et des préliminaires de paix ont été signés à Berlin par la Prusse, agissant d’inspiration et d’autorité pour toute l’Allemagne. Ainsi la victoire de Frédéricia aura vraisemblablement mis fin à la guerre du Schleswig-Holstein, si les adversaires de l’hégémonie prussienne veulent bien reconnaître et sanctionner la résolution prise au nom de l’Allemagne par le cabinet de Berlin.


— La Hollande continue à jouir d’un calme qui lui permet d’accorder toute son attention aux débats parlementaires. La seconde chambre dés états-généraux a repris ses travaux. Deux projets de loi importans, — l’un sur les étrangers résidant en Hollande, l’autre relatif aux domaines de la couronne, — lui sont soumis. Dans la discussion du projet de loi sur les étrangers, deux opinions se sont trouvées en présence : d’un côté, on ne voulait que soumettre à quelques restrictions justifiées par l’état de l’Europe cette ancienne hospitalité hollandaise qui s’exerçait si libéralement du temps des persécutions religieuses ; de l’autre, on réclamait des mesures toutes préventives. Le débat a été intéressant, et de nombreux argumens tirés de l’histoire de la Hollande ont pu être cités à l’appui de l’une et de l’autre thèse. Enfin la discussion générale a été close. Le principe du projet présenté par le gouvernement, et qui lui laisse une grande liberté d’action, a été adopté. La chambre est loin d’avoir arrêté aussi nettement ses opinions sur le projet relatif aux domaines de la couronne et à la liste civile. La résolution du roi de réduire cette liste de 400,000 florins a été accueillie très favorablement dans le pays ; mais il reste à examiner si les domaines de la couronne tomberont sous la gestion de l’administration publique, ou s’ils resteront soumis à l’intendance royale. Une partie de la chambre désire le premier mode d’administration, se fondant sur la plus grande régularité du système, et sur l’intérêt bien entendu de l’état et de la couronne. D’autre part, on trouve injuste d’ôter au roi l’administration de domaine dont il percevra les revenus. La question se réduit à ceci : allouera-t-on annuellement au roi un million de florins en argent, ou bien 600,000 florins en argent et 400,000 florins en produits de domaines[1] ? À l’appui de ce dernier mode, on cite l’exemple de la France impériale. Napoléon, par le décret du 1er mars 1808, sauvegarda la splendeur qui convient à la dignité du trône en assurant au chef de l’état la possession de revenus indépendans de la couronne. Les intérêts d’un prince qui a de nombreux domaines sont d’ailleurs plus étroitement liés aux intérêts du pays, et, bien que la division du sol soit désirable en général, il faut avoir soin de garder quelques grands propriétaires ; une saine économie l’exige. Toutes ces considérations font hésiter la chambre, et le projet du ministère sera l’objet, selon toute apparence, d’une vive discussion. Déjà deux dispositions importantes et contraires à l’opinion du cabinet ont été introduites dans ce projet : l’une, proposée par M. Van Zuylen, interdit la perception de dîmes

  1. Les domaines de la couronne, en Hollande sont de peu d’étendue, et consistent particulièrement en dîmes. On évalue le produit net de ces domaines à 160,000 florins et celui des dîmes à 240,000 florins.