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Enfin l’article qui confie la dignité impériale à l’un des princes régnans est adopté par 258 voix contre 211 ; les ultramontains et les Autrichiens se sont vainement coalisés avec la gauche pour rayer cette disposition. Ce point admis, il fallait savoir si l’empire serait héréditaire ou électif. M. Uhland défendit l’élection dans un discours plein d’éclat ; le principe de l’hérédité eut pour avocats MM. Dahlmann et de Vincke. La lutte fut opiniâtre, et des propositions sans nombre se disputèrent la priorité. Enfin le fanatisme prussien fut battu ; l’assemblée décida par 263 voix contre 211 que la dignité impériale ne serait pas héréditaire. L’assemblée n’avait pas condamné en principe l’hérédité de la couronne ; c’était une loi de circonstance qu’elle venait de voter ; elle n’avait pas voulu que la Prusse fût définitivement investie de l’empire, au moment où cette question excitait tant de rivalités et pouvait allumer la guerre civile. Il importait, au contraire, de laisser une issue ouverte aux espérances des autres pays et d’attendre des temps plus propices pour proclamer l’hérédité. Les attributions de l’empereur furent votées ensuite sans résistance sérieuse, ainsi que le conseil de l’empire (Reichsrath) ; ce conseil se composait de plénipotentiaires de chaque état allemand et devait fournir un solide appui au gouvernement impérial.

Telle était dans son ensemble et dans ses détails les plus importans cette constitution du futur empire d’Allemagne. Il restait encore à décider un point très grave, le mode d’élection pour les députés de la chambre du peuple ; ce devait être et ce fut effectivement l’objet d’une loi spéciale, discutée et votée deux mois plus tard. Il restait aussi à faire la seconde lecture de la constitution. On pouvait cependant prévoir qu’aucune disposition fondamentale n’y serait changée, et dès ce moment le choix de l’empereur devenait la grande affaire, l’unique préoccupation des esprits. Tous les regards étaient tournés vers le roi de Prusse, regards supplians d’un côté, de l’autre irrités ou menaçans. Oserait-il, pensaient les uns, accepter un empire fondé sur l’exclusion de l’Autriche, et contre lequel protesterait toute l’Allemagne du midi ? Pourra-t-il bien, disaient les autres se soustraire aux devoirs sacrés que lui impose la volonté du parlement ? Se laissera-t-il effrayer par des périls qui n’ont pas arrêté l’assemblée nationale ? Oubliera-t-il la mission de la Prusse, et, par des ménagemens diplomatiques empêchera-t-il le couronnement de notre œuvre ? — Au moment de prendre une décision si grave, on comprendra sans peine le cruel embarras de Frédéric-Guillaume. L’ambition et la prudence le poussaient et le retenaient tour à tour. Rejeter les avances de l’assemblée nationale, c’était perdre peut-être une occasion unique, une occasion qui semblait admirablement d’accord avec la politique et les audacieuses destinées de la Prusse. Accepter, n’était-ce pas faire alliance avec l’esprit