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sans doute avait achevé les droits fondamentaux : c’était là une belle charte philosophique où de grands principes étaient posés, où des libertés fécondes étaient promises ; mais, pour faire admettre ces droits fondamentaux, il fallait d’abord que la constitution politique fût en vigueur. Et qu’avait produit jusque-là cette constitution tant désirée ? La division de l’Allemagne, une division plus profonde et plus cruelle que jamais ; l’Autriche, qui était jadis le cœur même de la patrie allemande, était exclue du futur empire ! Aussi le bruit se répandait déjà que le parlement allait cesser d’exister, et qu’un congrès de princes se réunirait bientôt pour accomplir la grande tâche si gravement compromise par le congrès des peuples. — D’ailleurs, le parlement ne s’était-il pas frappé lui-même ? Entre la Prusse et l’Autriche, l’assemblée de Francfort avait un rôle à jouer, et la nécessité de ce pouvoir intermédiaire assurait son avenir ; l’Autriche exclue, la Prusse reste seule, et l’influence de Francfort n’est plus rien. — Voilà ce que disaient les esprits clairvoyans, non pas à Francfort seulement, mais par toute l’Allemagne, et le découragement, comme toujours, succédait aux folles illusions.

Le parti Dahlmann s’obstinait seul dans son inaltérable confiance. L’abaissement de l’Autriche était voté ; la Prusse allait recueillir son héritage, et l’empire allemand serait constitué comme l’avaient voulu les professeurs de l’église Saint-Paul. Les deux derniers chapitres de la constitution, le chapitre V sur la souveraineté de l’empire (Reichs-oberhaupt), et le chapitre VI sur le conseil de l’empire (Reichsrath), furent discutés du 15 au 26 janvier. Cette discussion était comme la suite de celle qui avait amené la séparation de l’Autriche et de l’empire d’Allemagne. Le projet de constitution établissait un empereur héréditaire, et, si ce système triomphait, il était manifeste que la couronne impériale appartiendrait au roi de Prusse. C’est pour cela qu’on vit les chefs de la gauche et les députés autrichiens, comme s’ils n’avaient qu’un seul drapeau, attaquer vigoureusement le projet de loi, Les ultramontains de la Bavière parlèrent le même langage que les athées de la jeune école hégélienne ; M. Philipps et M. de Lasaulx empruntaient tour à tour ou prêtaient leurs argumens à M. Vogt et à M. Nauwerck. Un député de la droite appartenant au midi de l’Allemagne de Rothenhan, propose un directoire composé de cinq membres ; après un vif et brillant débat, dans lequel MM. Bassermann et Beseler défendent avec talent l’unité du pouvoir, cette proposition est rejetée par 361 voix contre 97. M. Welcker demande que la couronne impériale soit décernée tour à tour, de six en six ans, aux deux souverains les plus puissans de l’Allemagne ; 377 voix contre 80 rejettent la proposition Welcker La gauche veut un empereur à condition que tout Allemand soit éligible ; 122 voix appuient cette demande, et 339 la repoussent.