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L’attention des Hollandais se concentre depuis quelques mois sur l’affaire de Bali. Les nouvelles récentes sont des plus heureuses. L’expédition, qui se composait en tout de sept à huit mille hommes, dont deux mille Européens, sous le commandement du général Michiels, a remporté, vers le milieu du mois d’avril dernier, une victoire complète ; les troupes néerlandaises se sont emparées, le 16 avril, de Djaga-Raga, résidence fortifiée du prince révolté de Beliling. Ce combat avait été précédé de quelques tentatives d’arrangement amical. Le 7, le prince de Karang-Assem et le chef de Beliling, après avoir demandé une entrevue au commandant en chef des troupes hollandaises, s’étaient présentés aux avant-postes, escortés de huit à dix mille hommes. On les avait reçus avec les précautions nécessaires à peu de distance du camp hollandais. Les princes offraient de se soumettre, pourvu que les intentions du gouvernement, au sujet de Bali, leur fussent communiquées. Ils demandaient aussi que le prince de Beliling pût être reçu le lendemain comme ils l’avaient été eux-mêmes ; mais le commandant hollandais, familiarisé avec les ruses des souverains indigènes, avait refusé d’arrêter la marche de son armée vers Djaga-Raga. Il avait donc été convenu que la nouvelle entrevue aurait lieu sur la route de Djaga-Raga, à Sangsit-Dalam. Cette rencontre pacifique de deux corps armés nombreux à si peu de distance est peut-être un fait unique dans les fastes militaires ; c’est un éclatant témoignage de l’ordre et de la discipline qui règnent parmi les troupes hollandaises, comme de l’esprit religieux des indigènes.

Le 8 avril, une colonne d’infanterie précédée d’artillerie se rendait à Sangsit-Dalam et occupait ce poste ; les soldats indigènes s’étaient retirés, les habitans avaient reçu les troupes amicalement. Toutefois l’entrevue définitive n’avait lieu que le 11, et on s’entendait sur les conditions suivantes : les radjahs ou princes de Beliling et de Karang-Assem déclareraient se rendre à la merci du gouvernement néerlandais et reconnaître le gouverneur-général de Batavia pour leur suzerain ; ils enverraient sous peu de jours une députation pour implorer leur pardon ; les deux princes se rendraient, le 13, auprès du commandant en chef hollandais, et on commencerait immédiatement à démolir les fortifications de Djaga-Raga, afin d’y opérer une ouverture assez large pour que le gros des troupes pût y entrer le 15, jour fixé pour l’érection du drapeau hollandais sur la forteresse balinaise.

Tout semblait jusqu’à ce moment faire prévoir une issue pacifique. Cependant quelques officiers supérieurs furent envoyés, le 13, pour reconnaître où en était la démolition convenue des lignes et redoutes ennemies. Ces officiers furent reçus assez bien, mais non pas sans réserve, et ils cherchèrent en vain quelque trace des travaux de démolition qu’on avait promis de commencer. Aussi le commandant hollandais renvoya-t-il, le 14, les mêmes officiers pour déclarer catégoriquement aux Balinais qu’il voulait une soumission nette et franche, et qu’il avait chargé les officiers d’indiquer les points où préalablement une brèche devait être pratiquée. Cette fois, la réponse des Balinais ne laissa plus de doute sur leurs intentions ; ils demandaient une nouvelle entrevue. Il était clair dès-lors qu’ils ne voulaient que gagner du temps, et les Hollandais se mirent en devoir d’agir.

Les fortifications de Djaga-Raga, construites sur une hauteur, étaient protégées de deux côtés par des ravins et par deux fleuves rapides. Dans la ma-