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est la capitale, et qui ne fait pas partie de la confédération germanique, entrerait désormais dans l’unité et enverrait ses députés à Francfort ; mais elle avait décidé aussi (il était permis de l’ignorer) que le duché de Posen ne serait pas incorporé à l’empire. La justice l’avait emporté sur l’esprit de conquête. Le Schleswig suffisait aux teutomanes ; on voulait bien réserver les droits de la Pologne.

Après cette confuse délibération, dans laquelle, selon la remarque très sensée de M. Wernher (de Darmstadt), on avait si longuement et si inutilement débattu une nouvelle carte d’Europe pour l’année 1900, l’assemblée passa à des sujets moins périlleux pour elle. Quel rapport convenait-il d’établir entre le nombre des représentans et l’importance de la population ? On décida qu’il y aurait un député par cinquante mille ames ; les états dont la population n’atteindrait pas ce chiffre n’en auraient pas moins un représentant à élire. Un singulier incident troubla la fin de cette séance : tandis qu’on délibérait sur le nombre des députés, M. Mittermaier annonça tout à coup à l’assemblée qu’une foule considérable d’hommes armés marchait sur l’église Saint-Paul. À ces mots commence un tumulte épouvantable. Les tribunes poussent des cris de joie. « Voilà le peuple ! crient des voix furieuses, ce peuple que vous ne voulez pas entendre ! Il vous montrera le chemin ! » Les hommes de la gauche, croyant déjà voir entrer le souverain, joignent leurs acclamations aux cris forcenés des tribunes. La droite indignée se lève et apostrophe violemment MM. Hecker et Struve. Ce n’était pourtant pas une révolution, ce n’était même pas une émeute ; une collision survenue entre la garde nationale de Francfort et une bande de démocrates avait causé tout ce bruit. Le calme se rétablit bientôt, s’il peut être question de calme à propos d’une assemblée politique inquiétée sans cesse par les tribunes et livrée par un président trop débonnaire à tous les hasards tumultueux d’une discussion sans frein.

Ainsi se termina la première journée du parlement des notables. Beaucoup d’inexpérience, beaucoup de discours emphatiques et médiocres, des discussions confuses, des incidens nuisibles à la dignité de tous, une déplorable pression des tribunes sur l’assemblée, voilà la part du mal ; la part du bien, ce fut l’attitude du parti de l’ordre, du parti sérieusement libéral, qui, indécis d’abord et mal sûr de lui-même, se forma dès la première séance à l’appel de M. de Gagern.

La première séance du second jour (1er avril) fut consacrée à la loi électorale. Tout citoyen allemand parvenu à sa majorité fut déclaré électeur et éligible, sans aucune condition de cens, sans aucune exclusion fondée sur les croyances religieuses, décision grave qui racheta d’un seul mot tous les Juifs d’Allemagne et termina une fois pour toutes cette contestation séculaire sur laquelle les esprits les plus libéraux n’avaient pu se mettre d’accord ! Privés, la veille encore, de presque tous les droits politiques, de toutes les fonctions importantes, chassés