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des prix a ruiné les filatures, les ouvraisons et les fabriques de bas de soie. La même cause atteint les ateliers de moulinage et de tissage de la ville d’Avignon et contraint plusieurs maisons de commerce à suspendre leurs paiemens. À Valence, où le produit des filatures montait, dans les années prospères, à la somme de 17 millions de francs, les propriétaires de magnaneries, ne trouvant pas à vendre leurs cocons, les ont fait filer eux-mêmes à l’aide de petits appareils domestiques imparfaits et coûteux. L’industrie déclinait ainsi du rang où l’avaient portée les progrès antérieurs.

L’importance des grands établissemens du Gard et de l’Aveyron, quelques usines isolées à Vienne, à Toulon, etc., classent l’industrie métallurgique du midi immédiatement après l’industrie séricicole. Les causes du ralentissement des travaux sont ici les mêmes que dans la Haute-Marne, et se traduisent en bloc par une réduction de moitié de la masse des produits. Épars dans divers départemens, quelques ateliers pour la filature et le tissage des laines ne sont pas sans influence sur le caractère et la richesse des districts où ils sont établis. Les principales fabriques existent à Vienne, Carcassonne, Chalabre, Limoux, Bayonne, Rodez, Saint-Geniez, Castres, Mende, Montpellier, Clermont-l’Hérault. Quelques-unes de ces fabriques, qui reçoivent des commandes du gouvernement, ont aisément traversé la crise ; d’autres, qui exportent une partie de leurs produits, n’ont reçu presque aucune demande du commerce extérieur. Le plus grand nombre, qui se consacrent exclusivement à la consommation locale, ont manqué, par suite de la gêne générale, des débouchés qu’ils rencontraient à leur porte dans les besoins usuels de la population. À cette inaction des métiers à tisser correspond une baisse effrayante dans le prix des laines, qui entraîne immédiatement un résultat très fâcheux pour l’avenir, la diminution des troupeaux. Les fabriques de gants à Grenoble et à Milhau, la préparation des cuirs entreprise dans cette dernière ville sur une échelle très étendue, le tissage des toiles de chanvre et de lin à Voiron, et surtout les savonneries et les huileries de Marseille, méritent encore de prendre place dans le relevé des forces manufacturières de la zone méridionale. Si on en excepte la tannerie, la chamoiserie, la mégisserie de Milhau, qui ont conservé leur personnel presque intact, et les industries propres à la ville de Marseille, dont les souffrances n’ont pas aussi fortement paralysé le mouvement habituel, le travail a subi partout une réduction de la moitié ou des deux tiers.

Dans la région occidentale, deux villes, Cholet et Mayenne, méritent à peu près seules le nom de villes de fabrique. À Cholet, dont les métiers tenaient leur solde près de quatre-vingt mille personnes à l’époque où le lin se filait exclusivement au fuseau, les filatures se sont mises en chômage dès le commencement de la crise ; le tissage a été suspendu pendant plusieurs mois, tandis que l’industrie du coton et de la laine perdait seulement la moitié de son activité. À Mayenne, les filatures de coton, les fabriques de calicots, de toiles grises en fil de lin et de quelques articles de fantaisie, ont manqué complètement la saison d’été, et l’inertie des ateliers a duré plusieurs mois à l’époque même où le travail est ordinairement le plus actif. La fabrication la plus importante des départemens de l’ouest est disséminée sur la surface d’une partie des anciennes provinces de la Bretagne et du Maine. Les noms de Quintin, Saint-Brieuc, Rennes, Morlaix, Laval, Mamers, disent assez qu’il s’agit de cette industrie des