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loin. La plupart des villages créés depuis cinq ans dans le sahel d’Alger et la Mitidja ont donné lieu à des remaniemens de ce genre. À la suite d’une négociation avec les Hadjoutes des environs de Cherchel, on a mis récemment au service de la colonisation 15,000 hectares. C’est aussi par le resserrement des tribus indigènes que le général Bedeau a ouvert la vallée du Safsaf aux colons européens. Dans la province d’Oran, le général de Lamoricière a procédé à peu près de la même manière, pour faire place aux communes dont il a préparé la formation. L’appoint en argent accepté comme indemnité par les tribus déplacées est très modique : il équivaut à peine à 2 francs par hectare. Loin de manquer de terres, la colonisation n’a pas encore utilisé la vingtième partie de celles qui sont devenues propriétés françaises. Néanmoins, dans la prévision de l’avenir, le gouvernement s’est préoccupé de combiner les opérations d’achats ou d’échanges d’après un plan d’ensemble. Ces mesures n’auront rien d’injuste, rien de rigoureux ; ce ne sera pas le refoulement brutal, ce ne sera pas le trafic perfide qui, trop souvent, dans le Nouveau-Monde, ont fait le vide devant les Européens. Ce doit être une transaction, loyalement offerte, librement acceptée, doucement accomplie. Habitué à la vie nomade, et n’ayant rien à craindre pour sa sûreté personnelle dans l’intérieur du pays, l’Arabe ne répugnera pas à s’y transporter, pourvu qu’on lui rende largement l’équivalent de ce qu’il abandonne. Au moyen de ces échanges, on parviendra à utiliser les terres domaniales situées trop loin pour être suffisamment protégées, et, dans la zone plus rapprochée, on groupera les établissemens européens de manière à ce qu’ils présentent une masse imposante.

La France possède en Algérie d’autres richesses domaniales : ce sont des mines, de fer, de cuivre, de plomb, de sel gemme, des sources d’eaux salées et d’eaux thermales, des carrières de marbre et de pierres à chaux hydraulique, des forêts contenant les essences les plus riches et les plus diverses, notamment le chêne-liège[1]. Lorsque le pays sera peuplé et fécondé par un courant d’affaires, ces propriétés ne manqueront pas d’acquérir une valeur considérable. Jusqu’à ce jour, peu de concessions ont été faites ; on n’en est encore qu’aux premiers tâtonnemens de l’exploitation, et il se passera bien du temps avant que ces ressources, précieuses pour l’avenir, occasionnent autre chose qu’un surcroît de dépenses.

Les biens domaniaux de l’Algérie sont aliénés par location, par affermage, par échange, par vente aux enchères ou de gré à gré ; le mode le plus ordinaire est celui des concessions faites par le gouvernement

  1. Nous avons déjà eu occasion de donner des détails sur les concessions de mines en Algérie. — Revue des Deux Mondes, livraison du 15 septembre 1847.