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occupés pour le service de l’état, et provenant soit des biens du beylick, soit de constructions faites depuis 1830 avec les ressources du budget algérien Dans cette classe figurent le palais du gouvernement à Alger, la Casbah, les nombreux bureaux des diverses administrations, les casernes, les mairies, les églises, les mosquées, les tribunaux les fortifications, les arsenaux, les hôpitaux, et enfin les terres réservées aux cultures militaires, les pépinières, les cimetières. Le tout forme 3,643 articles.

On a rangé dans la seconde catégorie les immeubles non affectés à des services publics, c’est-à-dire le fonds destiné à l’encouragement de la colonisation. Ces biens, au nombre de 11,485 articles, sont classés dans les états du domaine en immeubles urbains et ruraux : on leur attribue une valeur représentative de 42 millions. Voilà la vraie conquête de la France. C’est pour acquérir un domaine de 42 millions que nous avons dépensé déjà 1,100 millions et que nous continuons de dépenser 82 millions par an. Considérée à ce point de vue, la spéculation n’est pas brillante.

Les immeubles urbains, disséminés dans toutes les villes de l’Algérie, forment 5,643 articles, estimés 27,653,343 francs : ce sont des maisons, des boutiques, des magasins provenant des biens du beylick, des établissemens religieux ou des propriétés séquestrées. Les immeubles ruraux, d’une valeur de 14,300,000 fr., comprennent 5,842 lots, avec une superficie totale de 389,682 hectares. Les meilleures propriétés de cette nature sont les domaines désignés, sous le gouvernement turc, par le nom d’azel ou dépossession : c’étaient, pour la plupart, des biens confisqués. Dans un vaste rayon autour de Constantine, ils se trouvent rapprochés de manière à former, presque sans interruption, une étendue de 160,000 hectares. Ils sont, au contraire, dispersés dans les provinces d’Alger et d’Oran. Dans cette dernière région, sur 183,000 hectares de terrains domaniaux reconnus, 100,000 environ proviennent des territoires confisqués sur les fractions de la grande tribu des Beni-Amer, à peu près détruite dans le Maroc, où Abd-el-Kader l’a entraînée.

Les 390,000 hectares d’immeubles ruraux à la disposition, du domaine équivalent à la cent trente-cinquième partie de la France : cette superficie ne serait pas assez large pour asseoir solidement la colonisation, surtout si l’on en retranchait les espaces qui ne pourraient pas être livrés immédiatement à la culture, soit en raison de la nature du sol ou du morcellement des lots, soit par cause d’insalubrité ou d’insécurité ; mais il s’en faut que les chiffres produits dans l’inventaire de 1846[1] représentent la totalité des propriétés de la France en Algérie. Limité

  1. Les chiffres, depuis deux ans, ont dû être modifiés en sens contraire : en plus, par des découvertes ou des acquisitions nouvelles ; en moins, par des ventes, des échanges ou des concessions.