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au contraire, donné des résultats fructueux, et la France a toujours été tributaire de ces diverses nations. Noël de La Morinière, à qui nous empruntons ces détails, estime l’importation annuelle de 6,000 à 10,000 tonneaux au moins[1].

La Suède est, de toutes les contrées de l’Europe, celle où cette industrie a présenté le plus de développement. En 1750, un nommé Bauer, ayant préparé de l’huile de hareng pour son usage particulier, le baron Cahman, frappé des avantages que pouvait présenter cette fabrication, n’épargna ni soins ni sacrifices pour en doter son pays. On n’employa d’abord que les branchies et les intestins ; mais l’huile ainsi obtenue ayant trouvé des débouchés avantageux, et les harengs fréquentant alors en très grand nombre les rivages de la Suède, on se décida, en 1776, à brûler ou plutôt à cuire le poisson entier. Les bénéfices considérables réalisés par ce moyen excitèrent l’émulation. En 1783, on comptait plus de 200 brûleries bâties sur les rochers qui bordent la côte de Gothembourg jusqu’à Stramstadt. Cette position, en permettant de débarquer le poisson frais dans les brûleries mêmes et de se débarrasser facilement des résidus, favorisa d’abord la prospérité de ces établissemens, et fut plus tard la cause de leur destruction. En effet, la pêche ayant diminué, comme nous l’avons dit plus haut, on attribua la disparition du poisson à ces masses de trangrum ou marc de harengs bouillis qu’on jetait à la mer. Bien que cette opinion fût probablement mal fondée, le gouvernement, cédant au préjugé, ordonna de transporter ce marc dans l’intérieur des terres et de l’enfouir, ce qui ne pouvait se faire sans de grands frais. Les brûleurs furent ensuite obligés d’abandonner les côtes. D’autres tracasseries vinrent se joindre à ces premières mesures restrictives, et, bien que la fabrication de l’huile de hareng n’ait jamais disparu entièrement de la Suède, elle déclina rapidement et n’a jamais recouvré depuis son ancienne activité.

Le procédé employé pour extraire l’huile de hareng est des plus simples. On fait bouillir ces poissons, pendant cinq ou six heures, dans de grandes chaudières en cuivre, en ayant soin de remuer constamment jusqu’à ce que les harengs soient réduits en pâte. Alors on arrête le feu, on ajoute de l’eau froide, et on laisse reposer le tout pendant deux ou trois heures. On enlève ensuite l’huile qui surnage, et on la met en baril après l’avoir laissé déposer pendant quelque temps et l’avoir filtrée une dernière fois. Si la cuisson a été trop prolongée, l’huile ainsi obtenue est plus ou moins brunâtre ; dans le cas contraire, elle est blanche, limpide, et se prend en masse, comme l’huile d’olive, par l’action du froid. Dans cet état, elle est très estimée des Kamtchadales,

  1. Sur la fabrication de l’huile de hareng à la manière des Suédois. — Mémoire inédit communiqué par M. Valenciennes.