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de Dunkerque, on ne peut lui disputer que ses voyageurs, ses baigneurs et ses huîtres. Le commerce n’y porte que sur les besoins locaux. Dans l’année qui vient de s’écouler, vingt-six mille passagers sont arrivés à Ostende ou en sont partis par les paquebots anglais : c’est le plus fort mouvement qui se soit jusqu’à présent opéré sur cette lignes et Dunkerque n’y peut rien prétendre. Les voyageurs qui voudront s’épargner une partie de la fatigue du trajet par mer passeront de préférence par Calais, aujourd’hui desservi par des chemins de fer, et les monumens des arts accumulés dans les villes de Bruges, de Gand, d’Anvers, de Bruxelles, appelleront les touristes à traverser plutôt les Flandres belges que la Flandre française. Il ne faut pas songer davantage à conquérir les baigneurs dont le concours anime Ostende : ce qu’on recherche surtout aux bains de mer, c’est la beauté des sites, l’agrément de la promenade, et nous avons nous-mêmes assuré sous ce rapport la supériorité d’Ostende. La célèbre digue dont la vue fait, pendant la belle saison, une sorte de rendez-vous européen est un des travaux par lesquels Napoléon prépara nos soldats aux fatigues de la campagne d’Austerlitz, et il ne leur a rien fait faire d’égal sur nos côtes. Restent les huîtres. Il est indifférent à celles-ci de parquer à Ostende ou à Dunkerque ; le sol, les eaux sont absolument les mêmes, et si cette branche de commerce, florissante dans l’une de ces villes, est à peine cultivée dans l’autre, on n’en peut accuser que la négligence des hommes. Les parcs d’Ostende sont alimentés par des bancs d’huîtres artificiellement établis sur les côtes d’Angleterre avec des semences de choix, tirées de notre baie de Noirmoutiers. Sans doute l’extension que les chemins de fer doivent apporter dans la consommation des huîtres déterminera les habitans de Dunkerque à faire aussi bien que leurs voisins. Aucune industrie maritime n’est plus digne d’encouragement : indépendamment des travaux de la pêche, elle fournit actuellement à notre cabotage 320,000 quintaux métriques à transporter pour l’alimentation des parcs.

Au lieu d’entrer dans la voie large et facile qu’ouvrirait au commerce la concession, à l’arrière-port de Dunkerque, du cunctis undamque auramque patentem qui lui est si malencontreusement refusé, l’administration s’est arrêtée à séparer le service d’écoulement des eaux intérieures de celui de la navigation par l’ouverture dans l’enceinte de la ville d’une grande dérivation qui se rendrait en traversant les fortifications, dans le bas du chenal, et à construire au coude que forment entre eux le chenal et le havre un barrage et deux écluses qui transformeraient tout ce qui serait en arrière en un bassin à flot de 17 hectares. L’entrée du bassin étant ainsi rapprochée de la rade de 600 mètres, on présume que les navires pourraient toujours l’atteindre en une marée, qui n’est pas aujourd’hui. Ces projets sont ceux à l’exécution desquels