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comprises entre le Rosendal et la mer. Confiée à des compagnies de matelots, qui se répartiraient ensuite les terres fécondées par elles, cette entreprise ferait la fortune de cent pauvres familles, et, s’ils savent stipuler des conditions de mise en valeur, l’état ni la ville ne s’appauvriront en se détachant des 1,444 hect. de dunes inertes qu’ils détiennent.

La famine, la peste et la garnison de Gravelines sont encore mises au même rang dans les dictons de nos soldats. Cette ville vaut aujourd’hui beaucoup mieux que sa réputation. Charles-Quint le premier l’érigea en place forte en 1518 ; elle était couverte par une zone de lagunes infectes, et quand Turenne voulut l’investir, en 1657, les Espagnols poussèrent les inondations à quatre lieues de distance. En 1699, Vauban combina les moyens d’inonder les alentours à une lieue avec le desséchement de 26,000 arpens de marécages, et il augmenta beaucoup les fortifications pour compenser l’affaiblissement d’une insalubrité qu’on s’était accoutumé à considérer comme la plus sûre défense de la place. Malgré ses précautions, le séjour de Gravelines n’avait pas cessé d’être malsain. En 1764, la ville n’avait encore que 800 ames, et la campagne moitié moins. Les progrès combinés de la salubrité, de la culture et du commerce, ont aujourd’hui porté à 5,582 le nombre des habitans de ce même territoire. Le premier pas fait dans cette voie a été l’établissement du chenal actuel de l’Aa. L’embouchure naturelle s’était recourbée vers l’est sous la pression des vents d’aval, des marées, des dépôts qu’elles poussent à la côte, et l’entrée en était des plus difficiles : le chenal artificiel marche droit au nord-ouest jusqu’à 1,500 mètres au-delà de la laisse de haute mer, et le flot conduit de lui-même à l’embecquer les bâtimens venant de l’ouest au nord. Malheureusement pour la ville, les dépôts de l’Aa en éloignent tous les jours la mer, et elle est menacée d’être abandonnée par le commerce pour la Ville des Smoggleurs, située au bord du chenal, à 1,500 mètres plus bas.

Cet asile, ouvert par Napoléon (décret du 30 novembre 1814) à des contrebandiers anglais qui importaient de l’or en France, avait, dès ses premiers jours, offert un débouché considérable aux denrées du pays. Quand la paix fit tomber cette industrie, quelques habitans eurent l’idée de suivre en Angleterre la consommation qui s’éloignait d’eux. Telle a été l’origine du commerce d’œufs, qui a pris de si singuliers développemens à Gravelines. Il en a été expédié en


     kilogrammes     
1835
1,000,769         
1840
1,897,990         
1845
1,982,278         
1847
1,744,170         
1848
2,183,188