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ne doivent oublier : par eux, l’influence de nos mœurs a pénétré dans les parties les plus sauvages de la Nouvelle-Espagne, et en même temps des tribus errantes se sont converties en populations sédentaires et laborieuses, des pays déserts se sont couverts d’établissemens utiles, et l’agriculture a créé des sources de prospérité qui, de long-temps, ne seront pas taries.

Aujourd’hui cette prospérité, que la Californie doit à la production agricole promet de s’accroître encore, grace à la découverte inattendue de nombreux gîtes aurifères, dont le retentissement est venu jusqu’en France rendre quelque élan à notre commerce découragé. Certes, quelques déceptions sont à prévoir parmi les colons que l’espoir d’une richesse facile attire de tous les points de L’Europe vers cet autre Dorado ; mais, si l’on réfléchit que ce qu’on appelle improprement des mines d’or le long du Rio-Sacramento et dans les plaines de Monterey n’est réellement que le produit des filons à fleur de terre arraché aux montagnes et disséminé par les eaux torrentielles, que ne doit-on pas attendre de la découverte et de l’exploitation des mines qui nous sont révélées par de si magnifiques échantillons ! D’ailleurs, l’agriculture, qui trouve en Californie des conditions si favorables, assure aux chercheurs d’or désabusés d’amples dédommagemens. Le commerce pourra offrir aussi à d’autres colons un emploi non moins utile de leur activité ; San-Francisco, avec son immense rade, est destiné à devenir l’entrepôt et le point de transit entre les mers de la Chine ou de l’inde et l’intérieur de l’Amérique. Aussi l’engouement dont la Californie est aujourd’hui l’objet, qu’il soit ou non fondé, aura-t-il pour résultat de développer dans ce pays une prospérité dont la population émigrée profitera, soit qu’elle concentre ses forces sur l’exploitation des mines, soit qu’elle les porte sur l’agriculture ou sur l’établissement de comptoirs commerciaux.

Tout charmé qu’il est de l’aimable hospitalité des missionnaires, M. Coulter finit cependant par se lasser de la vie un peu monotone dont on l’a convié à partager les loisirs. Autour de l’enceinte des missions, la riche et magnifique nature du Nouveau-Monde déploie ses pompes les plus séduisantes. La côte de Californie, dans les environs de San-Francisco, est bordée de forêts admirables et très giboyeuses. À l’ombre des grands pins, sous les noisetiers et les magnolias odorans, le docteur peut voir voltiger les perroquets gris, les coqs de bruyères et les poules de Guinée. La surface des lacs est toute couverte de cygnes, d’oies et de canards sauvages. Les montagnes voisines ont aussi leurs hôtes, et les hurlemens lointains des jaguars, des pumas, des ours gris, résonnent chaque nuit aux oreilles du docteur comme un irritant défi. Le hasard, qui amène aux missions un des chasseurs les plus renommés de la Californie, sert à merveille M. Coulter, qui n’attend,