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Dans l’année où l’expédition du capitaine Trotter eut lieu, la crue avait été très forte, et par conséquent l’étendue du terrain inondé plus considérable que d’habitude. Les causes de maladie devaient être plus nombreuses et plus redoutables. M. William Allen avait donc fait un sacrifice nécessaire en quittant la rivière avant la décroissance des eaux Les Anglais ont donné à l’embouchure du Rio-Noun, par où l’expédition de 1841 a pénétré dans le Niger, le nom de Porte du cimetière.

L’année suivante, au mois de juillet, le lieutenant Webb, de la marine royale d’Angleterre, est entré dans le fleuve pour ravitailler la colonie formée au confluent du Tchadda et du Niger ; mais il l’a trouvée dans un tel état de désorganisation, qu’il en a ramené tous les débris à Fernando-Po.

Telle est, en résumé, l’histoire des expéditions tentées pour l’exploration du Niger. Si la France, qui a des intérêts de politique et de commerce à la côte occidentale d’Afrique, n’a pas pris sa part des périls affrontés en dernier lieu par l’Angleterre pour le progrès de la civilisation dans ces contrées, elle pourra avant peu revendiquer une place dans cette grande entreprise. Un de nos jeunes officiers de marine se propose de remonter incessamment le Niger. M. le capitaine de vaisseau Bouet-Willaumez, dans un excellent livre publié en 1846[1], semble avoir d’avance, tracé le plan de cette expédition. « En pénétrant, dit-il, dans le Niger par la branche d’Ouère, qu’on peut qualifier du nom de branche française à cause de nos anciennes possessions, mais en y pénétrant avec un petit pyroscaphe calant un mètre au plus, lequel pyroscaphe n’aurait, comme ceux du Sénégal, que des matelots et des mécaniciens indigènes, même des officiers africains instruits en Europe, on éviterait à la fois l’influence de la partie la plus marécageuse du delta et les ravages mortels qu’exerce le climat sur la constitution des Européens. Ce rôle semble réservé à la France, qui a formé une pépinière de jeunes mécaniciens sénégalais, et fait parcourir en se jouant à ses pyroscaphes du Sénégal près du double de la distance du cours exploré du Quorra ou Niger. Sans doute ce dernier fleuve n’est pas, comme on avait pu le penser, un large et profond cours d’eau navigable jusqu’au grand centre africain de Tombouctou, où s’est illustré notre compatriote Caillié ; mais Il reste beaucoup à faire pour relier ensemble les explorations des voyageurs Caillié et Lander. » Ajoutons qu’il ne faudrait pas se borner à relier, comme le dit M. Bouet, les découvertes déjà faites. Une vaste carrière s’ouvre devant les voyageurs. Le Tchadda, qui vient se perdre

  1. Description nautique des côtes de l’Afrique occidentale comprises entre le Sénégal et l’équateur.