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influente et peu riche en Tyrol, est concentrée dans les petites villes de Trente et de Roveredo. Quelques familles titrées vivent seules dans la campagne. Les hommes qui jouissent de quelque influence sur la population sont les médecins, les avocats, les magistrats de second ordre, les membres du clergé et les petits propriétaires. Ces hommes eux-mêmes n’ont pour la plupart jamais quitté leurs vallées ; ils ne peuvent par conséquent avoir d’idées bien arrêtées sur ce qui ne touche directement leur pays. En politique, ils ont moins des opinions que des sentimens. L’Autriche les a trompés, donc ils détestent l’Autriche. Leurs intérêts commerciaux et industriels, ainsi que leurs sympathies, les attirent vers l’Italie ou vers la Suisse. Pour se séparer de l’Autriche, ils sont prêts aux plus grands sacrifices. Ce sont les médecins, les avocats, les prêtres, qui donnèrent le signal de l’insurrection de 1848. Leur plan était simple. Il s’agissait, en premier lieu, de chasser les garnisons et les autorités autrichiennes. Il fallait ensuite garder les passages des montagnes et empêcher l’ennemi d’y rentrer. Pour les seconder dans cette dernière partie de leur tâche, les Tyroliens comptaient sur l’appui de la Lombardie, de la Vénétie et du Piémont.

À peine la nouvelle des événemens de Milan fut-elle parvenue dans le Tyrol, que les montagnards se rangèrent autour des hommes les plus éminens de cette classe moyenne. Des bandes de cinquante et cent hommes se formèrent ainsi spontanément, commandées par les médecins, les avocats, les prêtres, dont l’influence sur la population était le mieux établie. Une terreur panique s’était emparée des troupes autrichiennes. Les soldats se retirèrent sans résistance devant la population soulevée, les uns pour rejoindre les troupes qui se concentraient dans les forteresses de la Vénétie, les autres pour aller à la rencontre des renforts qui arrivaient de l’Allemagne. Une seule ville fit exception, par sa tranquillité, au milieu du mouvement général. Tandis que le drapeau tricolore flottait sur tous les clochers du Tyrol, Trente ne s’émut pas. Les Tridentins étaient cependant renommés pour leur énergie et leur patriotisme. La garnison autrichienne de Trente ne dépassait pas d’ailleurs deux ou trois cents hommes. Ce fut un premier mécompte. On a pu s’expliquer depuis l’inaction des habitans de Trente. Il est certain qu’une population ardente et résolue se serait autrement conduite ; toutefois il y a loin de la mollesse à la lâcheté, à la trahison surtout. Les Tridentins n’étaient coupables que d’avoir attendu, pour s’insurger, l’arrivée des montagnards des vallées voisines, et d’avoir cru inutile d’agir contre une garnison de deux cents hommes, paralysés par la retraite des troupes autrichiennes dans tout le reste du pays.

Quoi qu’il en soit, l’insurrection avait triomphé dans tout le Tyrol, excepté à Trente. La première préoccupation des montagnards fut de