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à la valeur de la chose imposable, mais un impôt de répartition, c’est-à-dire une taxe répartie entre chaque contribuable de manière à ce que le montant des cotisations réunies fournisse la somme dont le besoin se faisait sentir 60 millions étaient demandés. M. Goudchaux, ayant estimé à 3,716,000,000 de francs le total des revenus classa dans les catégories spécifiées, en concluait que la répartition ne ferait peser sur la richesse mobilière qu’une charge inférieure à 3 pour 100. Chaque département devait fournir un contingent déterminé par le chiffre combiné de sa contribution mobilière et de sa part dans l’impôt des portes et fenêtres.

Le projet du gouvernement manifestait des tendances démocratiques, pour lesquelles, il faut le dire, les hommes de finance ont peu de sympathie. On voulut voir dans certaines dispositions un retour sournois vers le système de l’impôt progressif. Étudié dans les bureaux de l’assemblée sous le poids de ces préventions, le projet y a subi des modifications radicales. Un représentant qui s’est révélé avantageusement dans la discussion sur la présidence, M. de Parieu, a été chargé de motiver les amendemens de la commission. Son rapport annonce une érudition assez rare parmi nos hommes politiques ; on y remarque aussi la lucidité d’exposition et un tour distingué, qualités qui sont des indices d’excellent esprit quand elles éclatent dans les matières abstraites.

La commission dont M. de Parieu a été l’organe a considérablement abaissé les minima au-dessous desquels on échappe à la cotisation, parce que, dans un pays de morcellement et de petite existence comme est malheureusement le notre, on est obligé d’atteindre tout le monde, si l’on veut qu’un impôt soit fécond. La distinction proposée, à l’exemple des financiers anglais, entre la rente du propriétaire foncier et le bénéfice du cultivateur qui exploite le fonds est effacée : « Le comité pense que la contribution foncière n’a point été établie sur le produit abstrait d’une terre sans travail et sans culture, mais sur le revenu d’un sol cultivé, et qu’en conséquence une taxe sur les bénéfices de l’exploitation agricole ferait double emploi. » On observe, à l’égard des propriétaires qui exploitent par eux-mêmes, que, dans la pratique, il serait difficile de les atteindre deux fois, où injuste de ne soumettre leur terre qu’à un seul impôt ; on craint, enfin, qu’au renouvellement des baux, le fermier ne trouve le moyen de faire payer indirectement sa taxe à son propriétaire. Par ces considérations que nous nous réservons de discuter plus loin, l’immunité est étendue à l’industriel qui cultive la terre, comme au capitaliste qui la possède.

La commission a repoussé de même l’idée de taxer isolément chaque localité, en raison de sa richesse présumée. On n’a vu avec raison dans cet arrangement qu’une loterie fiscale, ayant l’immoralité de toutes les opérations aléatoires. Par un retour à la règle commune de