Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 1.djvu/123

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

projet ministériel, reconnaît à son tour qu’elle s’est formé, non pas une conviction, mais une opinion, « après des tâtonnemens pénibles et des sondages réitérés en tous sens ; qu’elle ignore le chiffre de la fortune mobilière du pays, sa répartition entre les habitans, et la proportion dans laquelle elle viendrait se soumettre à l’impôt ; que la fixation de la taxe à 3 pour 100 ne repose sur aucune donnée authentique, et qu’en l’absence de documens meilleurs que ceux qui sont fournis par le gouvernement, elle n’a pas de raison pour la repousser. » En somme, l’assemblée nationale, laissée dans les ténèbres pour délibérer, va voter l’inconnu.

Si le comité des finances avait cru devoir exposer au public les résultats de ces sondages qu’il a opérés, le présent travail eût sans doute été inutile. À défaut de renseignemens officiels, nous avons été conduit à décomposer les élémens de la fortune publique ; nous avons recherché comment et dans quelle mesure se forme le revenu de chaque classe par la distribution des richesses produites. Cette laborieuse analyse dissipera sans doute plus d’une illusion.

Nous sommes forcé d’encadrer notre inventaire de la richesse nationale dans les limites tracées par le projet de loi dont nous entreprenons l’examen.

En demandant à chaque citoyen une cotisation proportionnée à ses ressources effectives, le gouvernement avait reconnu l’inutilité d’atteindre des revenus déjà insuffisans. En conséquence, il avait fixé un minimum de perception dans les limites de 600 à 1,200 fr. pour les communes renfermant moins de 5,000 habitans, de 1,000 à 2,000 francs pour les communes au-dessous de 25,000 habitans, et de 1,500 à 3,000 francs pour les grands centres de population. Exception était faite en faveur des ouvriers non sujets à la patente, des militaires et des douaniers d’un grade inférieur ; on avait, par la même raison, laissé en dehors les revenus collectifs qui intéressent particulièrement les pauvres, comme ceux des hôpitaux et des communes. En considération des charges exceptionnelles supportées en ces derniers temps par la propriété immobilière, on n’entamait pas le revenu du fonds, déjà réduit par l’impôt foncier ; mais on supposait que l’industrie agricole proprement dite, donnant au fermier des bénéfices distincts de la rente du propriétaire, devait contribuer comme les autres genres de spéculation.

Dans l’impuissance où se trouvait le ministre d’indiquer les élémens et les résultats probables de la taxe, on avait proposé d’en faire, non pas un impôt de quotité, prélevé, suivant l’usage, proportionnellement