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de l’assemblée. Les 102 députés des comitats ont chacun un vote distinct, qu’ils soient élus par le comitat de Pesth, qui compte 12,000 nobles électeurs, ou par celui de Syrmie, qui en réunit à peine 100. Les 116 députés des villes royales, représentant 650,000 habitans, votent par ordre, c’est-à-dire n’ont qu’une voix tous ensemble, tandis que le comitat de Syrmie, avec ses 100 électeurs, en a 2. — Il en est de même pour le clergé catholique en certaines occasions ; mais, s’il se plaignait de la part qui lui est faite, on lui répondrait que 2 millions et demi de protestans sont sans représentation directe et sans défenseurs à la diète. — Où y a-t-il un droit reconnu, un principe avoué au milieu de cette confusion ? Voici les députés des absens ; chose étrange, ils remplacent à la seconde chambre ceux qui n’ont pas comparu à la première ! Oui, mais peu importe : ils ne sont là que pour constater le droit de leurs commettans ; ce sont des secrétaires : mandataires sans mandat, ils ne votent pas, ils rendent compte à ceux qui pourraient voter. — Les députés de la table royale jugent les contestations qui viendraient à s’élever, et maintiennent l’ordre des délibérations, tandis que ceux de la chancellerie rédigent dans la forme authentique les résolutions adoptées par les états, auxquelles d’ailleurs ils n’ont pas concouru. — Je pourrais relever bien d’autres singularités. Est-ce à dire, cependant, que ces règles connues et proclamées une fois le soient à toujours, et qu’il n’y ait plus qu’à compter les suffrages ainsi classés ? Les choses ne vont pas aussi simplement. On vous dira qu’il n’y a aucune loi sur la matière ; que la constitution hongroise n’a point d’autre décision sur le mode et le droit des votes ; que cet axiome, plus sage sans doute que facile à pratiquer : Vota non numerentur, sed ponderentur, « il ne faut pas compter les votes, mais les peser ; » que tout ce que je viens d’indiquer là résulte sans doute de précédens nombreux et à peu près admis ; que cependant on pourrait, en cherchant bien, en trouver de contraires, et que c’est précisément à ce propos que les difficultés actuelles ont surgi. Quant aux auteurs et aux jurisconsultes ayant le plus d’autorité dans la matière, ils exposent gravement « que cette curiosité est inutile, que le mode de délibération se borne à reconnaître l’opinion dans chacune des deux chambres, et à en faire sortir, soit par la discussion séparée, soit par la réunion dans les séances mixtes, un résultat commun, propre à être soumis à l’approbation du roi et à son rejet[1]. » Entende qui pourra.

Et les rapports des deux chambres entre elles sont-ils plus nettement définis ? Dans les séances mixtes, où les deux chambres sont appelées à délibérer ensemble, faut-il compter par tête, ou par ordre, ou par table, de telle sorte que le refus de l’une des tables paralyse la volonté

  1. Voyez Kelemen, Institutiones juris ungarici, et Schwartner, Statistique politique.