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demeurer sous la souveraineté du roi de Danemark, limitée simplement par la souveraineté plus ou moins étendue que le peuple allemand reconnaîtra à la diète sur chacun des états de la confédération.

C’est l’intérêt de l’Allemagne elle-même que le différend se règle dans ces termes. Il est difficile, en effet, que le Danemark accepte d’autres conditions, et il serait difficile également que les puissances garantes ou médiatrices n’intervinssent pas directement et effectivement dans la querelle, si la confédération germanique persistait à méconnaître des droits aussi évidens. Quelles seraient les conséquences de cette intervention ? Une guerre générale dans laquelle l’Allemagne désorganisée aurait sur les bras, avec le Danemark puissant par sa marine, la Suède et la Russie, l’Angleterre peut-être, pendant que la France, l’ame déchirée d’avoir à se prononcer contre un peuple auquel elle souhaitait depuis long-temps la liberté et la nationalité, serait cependant obligée de donner raison à ses adversaires. Voilà ce qu’aurait gagné la race allemande à abuser de sa force dans un premier essor d’ambition mal raisonnée pour porter atteinte à l’indépendance et à la nationalité de la race danoise. La guerre générale et les Cosaques combattant pour le bon droit sur Dantzik et Lubeck contre une prétention oppressive et antinationale de l’Allemagne, tel serait l’étrange et peut-être funeste renversement de rôles dont la nouvelle confédération donnerait le spectacle dès le berceau. Elle n’en sortirait ni plus honorée ni victorieuse. Les radicaux n’y trouveraient pas même l’avantage d’occuper les armées allemandes loin des délibérations du parlement de Francfort. À la place des soldats réactionnaires de la Prusse, ils courraient le risque d’être visités par les baïonnettes encore moins parlementaires des Russes. Il est donc de l’intérêt des amis de la liberté, en Allemagne, que la diplomatie allemande se présente avec des propositions admissibles dans les conférences qui vont s’ouvrir pour la paix. Et si le revirement d’opinion qui vient de s’accomplir à Francfort est sérieux, si l’assemblée n’a point pris à tâche de mettre en défaut toutes les prévisions raisonnables, il y a lieu d’espérer que la paix se fera.

Hippolyte Desprez.