Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 24.djvu/895

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

il trouvera ou il inventera, mais vous verrez qu’il saura créer de nouveaux obstacles. » Et comme M. Humann lui faisait observer que le moyen de l’arrêter n’était pas de lui céder toujours, M. de Werther, assez embarrassé, se borna à assurer tout bas M. Humann qu’on allait en finir, sans lui dire à quelle époque ni par quel moyen.

Combien de temps aurait traîné en longueur le conflit survenu entre lord Palmerston et les cours alliées ? Il est difficile de le prévoir ; mais M. de Metternich avait deviné juste. La réponse de Méhémet-Ali, arrivée d’Alexandrie le 28 juin, trancha les difficultés pendantes. Le pacha s’était enfin décidé à publier le hatti-schériff du divan, et s’était hâté de promulguer l’acte qui lui assurait l’hérédité de l’Égypte. Tout était ainsi terminé. Il n’y avait plus de scrupule à concevoir. Pour le soin de sa propre dignité, lord Palmerston voulut attendre qu’il eût reçu les nouvelles officielles d’Alexandrie par l’intermédiaire de son agent consulaire. Peut-être espérait-il que M. de Bulow, rappelé par son gouvernement pour aller présider la diète de Francfort, partirait avant l’arrivée des dépêches anglaises. M. de Bulow, cédant aux instances de ses collègues, prit le parti de rester.

Ainsi furent vaincues une à une toutes les résistances de lord Palmerston. La convention, dite des détroits, fut signée à Londres le 13 juillet 1841.

Les réflexions se pressent dans l’esprit quand on y repasse les phases diverses de cette affaire d’Orient. Nous nous interdirons d’en développer aucune ; les faits parlent assez d’eux-mêmes. Entre les faits que de contrastes étranges ! En 1839, ces dangereuses éventualités que les hommes expérimentés voyaient venir avec un certain effroi, le public court au-devant d’elles avec ardeur, les chambres législatives s’en emparent ; nul ne paraît douter qu’elles ne contribuent à nous rallier l’Europe, qu’elles ne nous apportent de prochains et éclatans succès. Une année seulement s’écoule : toutes les puissances se sont liguées entre elles et contre nous ; un arrangement est signé à notre insu, il est exécuté presque à notre confusion. Découragés par ce revers, pays et chambres rentrent alors dans leur indifférence, et laissent le gouvernement maître d’agir seul et sans éclat. Une autre année est à peine écoulée : ces mêmes puissances liguées contre nous ne peuvent plus s’entendre entre elles ; elles nous avaient malicieusement jetés dans l’isolement ; elles s’effraient de nous y voir ; elles nous demandent avec instance d’en sortir et de consentir à régler, de concert avec elles, précisément les mêmes questions qu’elles s’étaient flattées de décider sans nous. Nous recevons avec calme leur invitation ; nous faisons attendre long-temps notre adhésion ; nous y mettons d’assez fières et précises conditions : elles sont toutes acceptées. Cependant les ennemis irréconciliables