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de la note du 2 novembre, répondit que la France n’avait aucun droit de s’inquiéter de la conduite du sultan vis-à-vis d’un vassal. « Laissons là, dit M. de Bourqueney impatienté, le droit et l’intérêt ; ne prenons que les faits. Avez-vous ou n’avez-vous pas communiqué officiellement à Paris vos instructions du 17 octobre à lord Ponsonby ? Avez-vous ou n’avez-vous pas initié le gouvernement du roi à la détermination arrêtée entre vous et vos alliés de faire suivre la soumission du vice-roi de la concession de l’hérédité du pachalik d’Égypte ? Le pachalik d’Égypte doit être héréditaire ; nous sommes restés sur ce terrain, nous, et nous vous y croyons encore. » La conversation se termina par ces paroles[1]. A Constantinople, autre incident plus grave encore : la Porte, ayant consulté les ambassadeurs des puissances du Nord sur la conduite qu’elle devait tenir vis-à-vis de Méhémet-Ali, ceux-ci avaient répondu par le conseil d’accepter la convention du commodore Napier ; mais, en donnant le même conseil, lord Ponsonby avait ajouté cette phrase singulière : Bien entendu que les conditions ne pourraient être acceptées qu’autant que Méhémet-Ali se soumettrait, et que la Porte restait seule juge de ce qui constituait une véritable soumission[2].

L’irritation des cours du Nord et des plénipotentiaires allemands à Londres ne connut plus de bornes, quand ils apprirent ce nouvel obstacle mis à leur projet de conciliation, et qui leur parut le résultat d’un jeu concerté entre le ministre anglais et son ambassadeur à Constantinople. M. de Brunow parut, pour la première fois, partager les sentimens de ses collègues. L’effet de ce concours fut assez puissant pour obliger lord Palmerston à consentir à une réunion de la conférence ayant pour but de mettre ordre aux menées imprudentes du représentant anglais à Constantinople[3]. Dans une autre conférence, une note collective fut rédigée en réponse à celle du ministre ottoman. Cette note, par laquelle les quatre puissances conseillaient au sultan de concéder l’hérédité au pacha d’Égypte, devait, dans l’esprit des plénipotentiaires réunis à Londres, terminer les incertitudes de la politique du divan.

Les cours de Berlin et de Vienne, une seconde fois rassurées sûr la question égyptienne, ne pouvaient manquer de reprendre leur tâche favorite. Ces tentatives de conciliation étaient-elles mieux goûtées à Saint-Pétersboug par l’empereur qu’à Londres par lord Palmerston ? L’extrait suivant d’une dépêche de M. de Barante en fera juger.

« Saint-Pétersbourg, 8 février 1841.

« … M. de Nesselrode a répondu à lord Clanricarde que tout était effectivement

  1. Dépêche de M. de Bourqueney, 9 janvier 1841.
  2. Ibid., 18 janvier 1841.
  3. Ibid., 19 janvier 1841.