Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 24.djvu/814

Cette page a été validée par deux contributeurs.

et toute la caserne rentra dans l’ordre. M. Toffoli put, en revenant auprès de ses collègues, leur annoncer un nouveau succès.

Toutefois cette double victoire sur la révolte était au fond peu significative et peu rassurante. La mobilité de ces troupes, leur insubordination, restaient un fait acquis, et auquel il importait de parer promptement. Il était évident que les soldats vénitiens ne pouvaient être retenus plus long-temps loin de leurs foyers, et on les rendit aux provinces qui les réclamaient. Ce n’est pas sans intention que j’ai exposé avec quelque détail les circonstances qui ont précédé cette mesure du licenciement de la petite armée vénitienne. Cet acte du gouvernement républicain est un de ceux qu’on a le plus amèrement blâmés ; on voit cependant quelle pressante nécessité le lui a imposé.

La question que Venise avait cru un moment pouvoir résoudre par ses propres forces se représentait donc de nouveau : où trouver des soldats ? La Lombardie comptait sur l’armée piémontaise pour se donner le temps de créer une armée lombarde ; mais la distance ne permettait pas aux Vénitiens de tirer des troupes stationnées sur la rive gauche du Mincio les mêmes avantages que les Milanais, et d’ailleurs la constitution républicaine de Venise rendait l’intervention du roi Charles-Albert en sa faveur pour le moins douteuse. Quant à la formation d’une armée régulière, c’était un effort que la république ne pouvait s’imposer, et ses ressources financières le lui eussent-elles permis, le temps lui eût manqué. Il ne lui restait qu’à chercher son point d’appui dans les corps de volontaires. C’est à eux qu’elle s’adressa.

Les volontaires lombards et les premières colonnes arrivées de Naples gardaient les passages des Alpes suisses et tyroliennes depuis la ligne des lacs de Como et de Lecco jusqu’à celle des lacs d’Idro et de Garda. Les troisième et quatrième colonnes de volontaires napolitains avaient été embarquées sur le Pô à Pavie pour être dirigées sur Mantoue ou sur Ferrare, et y rencontrer la grande armée napolitaine qui accourait au secours des Vénitiens. Les volontaires toscans avaient pris par Plaisance et rejoint l’armée piémontaise aux environs de Mantoue. Quant aux volontaires romains, ils formaient, avec deux beaux régimens de Suisses pontificaux et quelques régimens de la ligne romaine, un corps d’armée considérable par le nombre des soldats comme par leur bravoure. L’excellente discipline des Suisses, la beauté virile de l’ardeur patriotique des volontaires, les talens bien connus du général Durando, tout se réunissait pour appeler sur le contingent romain la confiance et les sympathies de tous les patriotes italiens. C’était aussi sur cette armée que Venise avait concentré toutes ses espérances ; mais à peine le général Durando eut-il passé le Pô, qu’un ordre de Charles-Albert vint l’informer de la nécessité, pour toutes les troupes engagées dans la guerre de l’indépendance italienne, de reconnaître un